Plusieurs enseignes sont en train de retirer des produits à base de bœuf brésilien, qui a contribué à la déforestation en Amazonie. Et ce suite à l’enquête du collectif de journalistes Repórter Brasil.

Elevage bovin qui a entraîné une déforestation en Amazonie, à Rondônia, Etat du Brésil, en 2017. (MARIO TAMA/Getty Images via AFP)

par AFP et LIBERATIONpublié le 17 décembre 2021 à 12h52

Enfin une enquête dont les effets sont immédiats. Accusés de vendre du bœuf lié à la déforestation de l’Amazonie, plusieurs groupes de grande distribution, dont Auchan ou Carrefour, se sont engagés à retirer certaines marques de leurs rayons.

Cette annonce a été faite jeudi par l’ONG Mighty Earth, après la publication d’une enquête du collectif de journalistes Repórter Brasil mettant en cause des groupes comme JBS, Marfrig et Minerva, tous spécialisés dans la viande. Cette ONG les accuse de participer à la déforestation dans certaines régions du pays et soutient que les produits qui en découlent se retrouvent dans les supermarchés européens, sous la forme de bœuf séché, de corned-beef ou de viande fraîche.

La viande bovine brésilienne non grata

Ces révélations nuisent à l’image de la grande distribution, qui tente d’afficher une image plus verte et éthique. La viande bovine brésilienne est particulièrement problématique. La déforestation de l’Amazonie dans le pays a fortement augmenté depuis l’arrivée au pouvoir en janvier 2019 du président d’extrême droite Jair Bolsonaro, favorable à l’exploitation agricole de zones protégées et de territoires réservés aux indigènes. En trois ans, l’équivalent de la superficie du Liban a été rasé, principalement au profit de la culture du soja et de l’élevage de bétail.

Carrefour a retiré de ses magasins en Belgique une référence de la marque Jack Link’s, qui fabrique une partie de son bœuf séché au Brésil avec JBS, après le signalement de Mighty Earth. De son côté, Auchan a dit à l’AFP avoir engagé une procédure de retrait d’un produit Jack Link’s en France et être en train d’enquêter sur son origine. Le groupe rappelle par ailleurs qu’il ne s’approvisionne pas en bœuf brésilien pour ses marques distributeurs. D’après Mighty Earth, la chaîne de supermarchés belge Delhaize s’est quant à elle engagée «à retirer tous les produits Jack Link’s de ses rayons».

L’ONG relève aussi les initiatives de plusieurs autres chaînes de grande distribution, comme Lidl et Albert Heijn aux Pays-Bas, ainsi que Sainsbury’s et Princes au Royaume-Uni pour éviter de vendre du bœuf brésilien dont les producteurs seraient liés à des actions de déforestation. Un porte-parole de Sainsbury’s a confirmé à l’AFP avoir engagé un processus pour se fournir ailleurs qu’au Brésil en bœuf pour ses produits de «corned-beef». De même qu’Albert Heijn, qui dit à l’AFP : «[Nous] avons maintenant pris la décision d’éliminer progressivement la viande bovine brésilienne, et nous recherchons des alternatives provenant d’autres pays d’origine.»

Les fournisseurs indirects en question

«Ces mesures commerciales, ainsi que la nouvelle législation européenne destinée à lutter contre la déforestation importée, montrent que l’étau se resserre sur les destructeurs de forêts», s’est réjoui Nico Muzi, directeur de Mighty Earth Europe, cité dans le communiqué. L’UE est en effet en train de bûcher sur une loi qui empêcherait de vendre des produits liés à la déforestation sur le marché européen

De leur côté, les groupes brésiliens rejettent avec véhémence ces accusations. JBS, numéro 1 mondial de la viande, a assuré dans un communiqué qu’il pratiquait une politique de tolérance zéro «pour la déforestation illégale». L’industriel a expliqué avoir mis en place il y a dix ans un système de «contrôle par satellite de ses fournisseurs» et avoir ainsi déjà exclu «plus de 14 000 fermes» qui ne respectaient pas son cahier des charges.

Selon JBS, il n’est pas possible à ce jour de «contrôler de la même façon les fournisseurs des fournisseurs», mais le groupe dit avoir investi dans une nouvelle «plateforme verte» pour obtenir d’ici à 2025 «une chaîne d’approvisionnement sans la moindre trace de déforestation illégale». Marfrig a pour sa part affirmé dans un communiqué «être engagé dans le combat de la déforestation illégale depuis 2009 […], suivant un protocole strict» que ses fournisseurs sont tenus de suivre.

Plusieurs grands groupes brésiliens ont été accusés récemment de «blanchiment de bétail». Cette pratique consiste à transférer des bovins d’une ferme dont la viande ne peut être exportée en raison de la déforestation illégale sur ses terres vers une autre, dite «propre», non frappée par ces interdits.

Images liées:

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.