Un collectif de personnalités, dont l’historien Serge Klarsfeld et le cinéaste Robert Guédiguian, ainsi qu’une vingtaine de députés et sénateurs, appellent à la panthéonisation du héros de l’Affiche rouge, fusillé au Mont-Valérien il y a 78 ans.

Missak Manouchian (Photo12)

par un collectif

Monsieur le président de la République, Missak Manouchian, héros français porteur de tous nos idéaux, doit rejoindre ses frères et ses sœurs de lutte au Panthéon. Le 21 février 1944, vingt-deux membres du «Groupe Manouchian», FTP-MOI de la région parisienne, étaient fusillés au Mont-Valérien par l’occupant nazi. La seule femme du procès de l’Affiche rouge, Olga Bancic, fut guillotinée, le 10 mai de la même année, à la prison de Stuttgart.

Il y a 78 ans mouraient donc, pour la France, pour la République, en «Français de cœur», en «Français par le sang versé», en Français par l’héroïsme et le mérite, ceux qui avaient été arrêtés par les Brigades spéciales de la préfecture de police et remis aux Allemands. Ces derniers tentèrent de les couvrir d’infamie en les réunissant sur «l’Affiche rouge» qui, au contraire, fit d’eux aux yeux des Français, des héros. Qui mieux qu’un poète pouvait en rendre compte : c’était en 1955 que Aragon écrivit Strophes pour se souvenir au moment où l’on inaugurait la rue du Groupe Manouchian, dans le XXe arrondissement de Paris :

«Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes/ Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants/ L’affiche qui semblait une tache de sang/ Parce qu’à prononcer vos noms sont difficiles/ Y cherchait un effet de peur sur les passants/ Nul ne semblait vous voir Français de préférence/ Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant/ Mais à l’heure du couvre-feu des doigts errants/ Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA France.»

Reproduction de “l’Affiche rouge” qui fut placardée dans les principales villes de France sous l’occupation par les services de la propagande allemande. Elle présentait les portraits des 10 résistants parmi les 23 qui allaient être fusillés, au Mont-Valérien le 21 février 1944. (AFP)

L’amour de la France républicaine

Missak Manouchian, leur chef, engagé volontaire en 1939 mais tenu éloigné des combats parce qu’on se méfiait de lui, entra en Résistance dès 1941. Rescapé du génocide des Arméniens de 1915, alors qu’il avait 9 ans, accueilli, déjà, par la France, puissance mandataire au Liban, dès la fin de la Première Guerre mondiale, il immigra en France en 1925, à l’âge de 19 ans. Dès lors, la vie de cet homme debout se confondra avec le soutien aux Arméniens dévastés par le génocide, la lutte antifasciste et l’amour de la France républicaine. C’est pour elle, en le proclamant, en l’affirmant, qu’il mourra «en soldat régulier de l’armée de Libération» de ce qui était devenu son pays, sans que jamais il ne confondît le régime collaborateur de celui qui était encore le maréchal Pétain et la France née des Lumières, dont les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité étaient ses phares.

Missak Manouchian et les 22 autres condamnés du procès de l’Affiche rouge moururent,

«Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir / Vingt et trois qui criaient la France en s’abattant.»

Auprès de Geneviève Anthonioz-De Gaulle, de Pierre Brossolette, de Germaine Tillion, de Jean Zay et désormais de Joséphine Baker, Missak Manouchian doit trouver sa place au Panthéon, pour avoir été l’un des plus beaux exemples de sacrifice, d’héroïsme, d’amour de la France, terre de liberté et d’espoir. Pour y être le premier de tous ces torturés et fusillés du Mont-Valérien dont étonnamment aucun ne dort pour l’éternité en haut de la montagne Sainte-Geneviève, dont ces «vingt et trois étrangers et nos frères pourtant». Pour rappeler que la République française n’est elle-même que lorsque tous ses enfants la servent.A lire aussi

Missak Manouchian, apatride mais français par le sang versé

Après la première tribune, publiée dans Libération, et portée par le comité de parrainage de notre initiative «Missak Manouchian au Panthéon», de nombreuses personnalités, des parlementaires, des associations, signataires de ce texte, se sont joints à notre démarche. A votre tour, associez-vous à cette œuvre de mémoire et d’avenir https://manouchian-au-pantheon.org.

Comité de parrainage : Nicolas Daragon Maire de Valence, Katia Guiragossian Petite-nièce de Missak et de Mélinée Manouchian, Nathalie Heinich Sociologue, Guy Konopnicki Journaliste et écrivain, Alain Minc Conseiller politique, essayiste et dirigeant d’entreprise, Pascal Ory Historien, membre de l’Académie française, Pierre Ouzoulias Sénateur, Denis Peschanski Historien, directeur de recherches au CNRS, Ernest Pignon-Ernest Artiste plasticien, membre de l’Académie des Beaux-Arts, Jean-Pierre Sakoun Président d’Unité laïque, Claudine Tiercelin Professeure au Collège de France.

Comité de soutien : Pierre-Marie Adam Grand Maître de la Grande Loge de France, Emmanuelle Anthoine Députée de la Drôme, Cathy Apourceau Sénatrice du Pas-de-Calais, Eliane Assassi Sénatrice de Seine-Saint-Denis, présidente du groupe communiste républicain et citoyen du Sénat, Agnès B. Styliste, Jérémy Bacchi Sénateur des Bouches-du-Rhône, Serge Barcellini Président général du Souvenir français, Georges-Marc Benamou Cinéaste, scénariste, producteur, essayiste, Daniel Bénichou Président du «Chevalier de La Barre», Eric Bocquet Sénateur du Nord, Gilbert Bouchet Sénateur de la Drôme, Gérald Bronner Sociologue, membre de l’Académie de médecine, romancier, Céline Brulin Sénatrice de Seine-Maritime, Bernard Buis Sénateur de la Drôme, VP du groupe d’amitié France-Arménie du Sénat, Danièle Cazarian Députée des Bouches-du-Rhône, Ilana Cicurel Députée européenne, Sylvestre Clancier Président d’honneur du Pen Club de France, Mireille Clapot Députée de la Drôme, Laurence Cohen Sénatrice du Val-de-Marne, Hélène Conway-Mouret Ancienne ministre, sénatrice des Français de l’étranger, Sara Daniel Journaliste, Gérard Delfau Ancien maire, ancien sénateur, ancien VP du Parti radical de gauche, directeur de la collection «Débats laïques», Mireille Delfau-Rey Autrice, Gilbert-Luc Devinaz Sénateur du Rhône, président du groupe d’amitié France-Arménie du Sénat, Philippe Foussier Journaliste, ancien Grand Maître du Grand Orient de France, Alexis Govciyan Conseiller de Paris, ancien président du CCAF, Robert Guédiguian Cinéaste, scénariste, producteur, François Heilbronn Professeur associé à Sciences-Po Paris, Patrick Kanner Sénateur du Nord, président du groupe socialiste, Ecologique et Républicain du Sénat, Beate Klarsfeld Militante antinazie, défenseuse de la cause des déportés juifs en France, Serge Klarsfeld Avocat, historien, défenseur de la cause des déportés juifs en France, Daniel Kurkdjian Président du Conseil français-arméniens, François-Michel Lambert Député des Bouches-du-Rhône, Marie-Noëlle Lienemann Sénatrice de Paris, Pierre Mansat Ancien adjoint au maire de Paris (2001-2014), président de l’association Josette-et-Maurice-Audin, Jean-Michel Mis Député de la Loire, VP du groupe d’amitié France-Arménie de l’Assemblée nationale, André Molino Maire de Septèmes-les-Vallons, Marie-Pierre Monier Sénatrice de la Drôme, Emmanuel Pierrat Avocat et écrivain, Claude Pierre-Bloch Vice-président de la Licra, Henri Raczymow Ecrivain, Georges Sérignac Grand Maître du Grand Orient de France, Lucien Stanzione Sénateur du Vaucluse, Mario Stasi Président de la Licra, Valérie Toranian Directrice de la Revue des Deux Mondes, Sandrine Treiner Directrice de France Culture, Marie-Claude Varaillas Sénatrice de la Dordogne, Yannick Vaugrenard Sénateur de Loire-Atlantique, Jean Vigreux Président du conseil scientifique de la Fondation pour la mémoire de la déportation.

Associations : Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra), président Mario Stasi, Union des familles laïques (Ufal), président Christian Gaudray, Association des Libres Penseurs de France (ADLPF), président Thierry Mesny, «Le Chevalier de La Barre», président Daniel Bénichou, Société fraternelle des Amis de l’égalité : Laïcité et République sociale, président Hubert Sage, secrétaire général Adrien Vahakn Sage.

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