Paul Huet, un appelé du contingent, nous a confié le témoignage de ses deux années, 1661/1962,  passées en Algérie pendant le conflit. Ses souvenirs, inscrits sur le papier prés de 60 ans après, étaient au départ  destinés à ses enfants et à ses petits-enfants. Nous lui avons proposé de le publier sur notre blog car il apporte un éclairage original sur cette histoire et  propose un  regard bienveillant  sur ce pays et ses habitants. L’auteur de ses lignes eut, en quelque sorte,  la chance de ne pas se trouver en première ligne, ce ne fut pas  son rôle, il n’était pas soldat mais enseignant. Son récit tient en une dizaine d’épisodes, de la conscription, aux classes, aux EOR puis au Sahara, à la découverte des Touaregs et des Maures mais aussi des chameaux et des foggaras, ces systèmes d’irrigation souterrains,  en attendant la quille mais en passant par les Accords d’Evian et l’Indépendance de l’Algérie, c’est à un voyage dans l’Histoire et dans l’intimité d’un homme auquel nous vous convions. La Rédaction d’Ancrage    

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

1/10 : les classes

Le 1er septembre 1960, après quelques mois de sursis accordé pour les études, je fus appelé à effectuer mon service militaire.  Dès l’année 1958, j’étais présenté au ” conseil de révision[1] ” qui détermina mon aptitude au “service armé”.  Ce conseil de révision réunissait au chef-lieu de canton tous les jeunes de la même classe d’âge qui, selon la coutume, comparaissaient, nus, devant une commission qui devait statuer sur leur aptitude au service. Ce jour du conseil de révision était un jour de fête pour les jeunes : il consacrait ainsi leur entrée dans la vie adulte et leur aptitude à servir la nation. Beaucoup, en ces temps troublés, cherchaient à se faire réformer en produisant des certificats médicaux honnêtes, mais généralement inefficaces pour dispenser du service armé. Les jeunes “conscrits”, les gars de ma classe 1959, firent la fête au retour.

            A la maison, ce départ n’était pas sans entraîner d’inquiétude dans l’esprit de maman. Certes mon frère Joseph était rentré d’Algérie trois ans auparavant, mais maman gardait en elle le souvenir de ce long séjour et des dangers auxquels Joseph avait été confronté. Jean-Marie ayant été réformé, il lui fallait maintenant envisager un autre départ. Mon état d’orphelin de père permettait au moins que je passe les premiers mois de mon service en France métropolitaine.

                           Pomme de terre au creux du genou

Le 1er septembre 1960, je débarquai au 31ème BCP[2] de Granville. L’austère caserne de granit, ancrée sur la Pointe du Roc dominait la mer. De la place d’armes, la vue était magnifique, et à cette époque de l’année, la plage invitait encore de nombreux vacanciers à la détente et au bain. A l’intérieur de la caserne, ce fut autre chose : les “classes” commençaient…

            Les premiers jours se passèrent à constituer le paquetage que tout soldat reçoit à son entrée dans les armes. Puis les choses sérieuses débutèrent. Les chasseurs à pied sont une unité d’élite, aussi l’entraînement fut-il à la hauteur de la renommée du bataillon : marche à pied à la cadence rapide des chasseurs, exercices de maniements d’armes, exercices de tir, marches forcées en chaussures cloutées sur le sable de la plage, présentation des armes dans un alignement impeccable malgré le fort vent du large qui bousculait les rangs. Bref, la perspective plus ou moins proche du départ au combat en Algérie était bien présente dans l’esprit des chefs. Il leur fallait former des jeunes qui deviennent aptes aux opérations de guérilla menées sur le territoire encore français de l’Algérie. Quelques jeunes conscrits se rebellaient et se retrouvaient rapidement aux arrêts dans la prison de la caserne. D’autres ” tiraient au flanc” de différentes façons, essentiellement en se faisant “porter pâles” ; ce stratagème n’était guère plus efficace, le capitaine médecin ayant vite fait de découvrir la supercherie. Le plus terrible était sans doute la ruse utilisée par quelques-uns qui n’hésitaient pas à passer une nuit avec une pomme de terre épluchée au creux d’un genou plié et ligaturé par une ceinture. Le matin, au réveil, l’humidité de la pomme de terre ayant provoqué une forme de rhumatisme, la marche était quasi impossible. Le stupide contrevenant n’évitait pas en général la mise aux arrêts dans l’attente de sa guérison.

                                    Brimades, pompes, corvées

A aucun moment les “bleus” n’étaient tranquilles. Revues de paquetage, revues de détail, revues de chambrée, tout était prétexte à maintenir la pression grâce à laquelle se forgeait notre esprit de combat. Oui, il fallait combattre l’adversité en attendant l’adversaire lui-même… Les brimades se succédaient, destinées à laminer l’esprit de contestation de l’autorité manifestée par certains. Corvées en tout genre, ” pompes ” avec le fusil entre les mains, allers et retours vers la chambrée au pas de course lorsqu’un élément de la section était en retard, lit défait lorsque le sergent constatait le moindre pli du drap ou de la couverture ou lorsque l’ensemble n’était pas fait ” au carré “, briquage du parquet avec un cul de bouteille…  A cela s’ajoutait, la nuit, le faisceau intermittent du phare situé sur la pointe du Roc qui balayait régulièrement la façade de la caserne et illuminait l’intérieur de la chambrée. De l’étagère mal jointoyée située juste au-dessus de la tête du lit tombaient des punaises dont la piqûre avait tôt fait de réveiller le dormeur. Pour remédier à ce fléau nocturne il suffisait de passer la flamme d’un briquet ou d’une allumette dans les interstices entre les planches. Les punaises grillées devenaient totalement inefficaces jusqu’à ce que de nouvelles bestioles, venues d’on ne sait où, réapparaissent dans la nuit à la recherche d’épidermes nourrissants… Il fallait supporter, se taire, “s’écraser” sinon les sanctions tombaient. L’entraînement physique était sévère, courses en tout genre sur la piste du stade, et surtout longues marches à pied avec un lourd sac arrimé sur le dos.

Témoignage Algérie-Sahara (1960-1962)

2/10 : les EOR

Cela dura quinze jours. Admis à suivre le peloton E.O.R (Elève Officier de Réserve), je fus expédié au 71ème Régiment d’infanterie à Dinan pour une formation intensive destinée à préparer au commandement ces jeunes recrues dont des tests avaient su distinguer leurs qualités, au moins intellectuelles.

            Nouveau casernement, nouvelles têtes, nouveaux chefs. Quels que soient le lieu et les hommes, ce ne pouvait être pire que ce que nous avions vécu à la caserne de Granville. Et pourtant il s’avéra rapidement que l’esprit qui présidait à cet entraînement était le même qu’auparavant. Il fallait transformer ces jeunes en hommes capables de commander dans des situations de conflits. Donc tout ramollissement fut banni et nous retrouvâmes les mêmes pratiques qu’à la caserne du Roc de Granville, à la différence près que nous n’étions plus des bleus et que beaucoup étaient volontaires pour devenir officiers. Le peloton EOR allait durer deux mois et demi ; à la fin décembre ceux qui étaient admis devraient partir suivre la formation finale de six mois à Cherchell, sur la côte algérienne.  En ce qui me concerne, je me retrouvais à suivre une formation que je n’avais pas désirée et, de plus, j’étais assuré de passer un an en métropole en tant qu’orphelin. Donc je n’allais pas forcer mon talent…

                                                  Fausse manœuvre

Inutile de redire ce qui a déjà été dit. L’entraînement s’intensifia sous les ordres d’un sous-lieutenant appelé, instituteur dans le civil et frais émoulu de l’école de Cherchell. Il nous prit en main avec pédagogie mais fermement. Aucune dérive ne fut tolérée. Aucune faiblesse ne fut admise. Toujours la même obsession, compréhensible, de la sécurité des combattants. Plus l’entraînement est intensif, moins il y a de ” casse “. Les marches reprirent, des simulations de combat s’effectuèrent dans la campagne avoisinant Dinan, des séances de tir avec des armes différentes se déroulèrent au stand couvert de Quévert, dans la banlieue de Dinan ou parfois en pleine campagne, face à un talus. Une anecdote pour aider à comprendre la sévérité avec laquelle nous étions traités : lors d’une séance de tir au pistolet mitrailleur, en pleine campagne à 15 kilomètres de la caserne, nous étions alignés par groupes de 10 et devions viser des cibles à forme humaine. Le chargeur engagé dans son arme, l’un de nous se retourna vers le sous-lieutenant pour poser une question. Quand on sait la facilité avec laquelle cette arme peut partir, on comprend la réaction de l’officier : l’exercice fut arrêté, la section regroupée, nous rentrâmes à la caserne, et repartîmes sans tarder pour une marche de 15 kilomètres le sac à dos empli de quinze kilos de cailloux… Désormais il n’y eut plus de fausse manœuvre sur le champ de tir !

            Les exercices se succédèrent, combats dans la lande d’Aucaleuc, combats de nuit, revue de détail, revues de paquetage, revue de brodequins, cours d’armement, parcours du combattant, tir de nuit, tir à la grenade, tir au LRAC (lance roquette anti-char), tir au fusil-mitrailleur à la pointe de la Varde, tout près de Saint Malo. Des journées épuisantes de 25 à 30 kilomètres, mais aussi des temps de repos, des permissions de sortie en ville, des escapades en stop à Saint Malo, des dimanches au noviciat des Pères de Sainte-Croix, où nous sommes toujours accueillis chaleureusement par le père Mazé.

                                             Putsch des généraux

Les troubles s’intensifient en Algérie. La métropole s’enflamme. Dans les rues on crie ” Algérie Française !” En pleine nuit, le dimanche 30 octobre, l’alerte est donnée à la caserne. On craint un coup de main de l’O.A.S. On double les sentinelles de garde, les chargeurs sont remplis de balles. On dort au poste de garde, le fusil à portée de main. Puis retour au calme… Vendredi 04 novembre, discours du Général de Gaulle. Précisons que le 16 septembre 1959, Charles de Gaulle, président de la République avait prononcé un discours télévisé qui marquera un tournant dans le conflit algérien. Il lâche le mot “autodétermination” qui va provoquer l’incompréhension, la dénonciation de la trahison, le refus, lesquels conduiront aux barricades, à l’OAS et, en avril 1961, au putsch des généraux” (d’après B. Stora, “Le mystère De Gaulle : son choix pour l’Algérie” – Laffont 2009)

            Fin novembre se déroule l’examen E.O.R : exercices physiques, règlement, armement, transmissions, mines et pièges… bref, une récapitulation de toute la formation reçue jusqu’alors…

            La semaine qui suit est marquée par des manœuvres importantes à Beignon, près de Coëtquidan. Six jours d’entraînement intensif au bouclage de zone. Le temps est glacial. Il neige parfois. Les nuits sous la tente sont peu reposantes et les réveils peu enthousiastes.

Au retour à la caserne se déroulent les derniers examens et la remise des appréciations : ” très bien, sérieux, consciencieux. Apte à faire un gradé. ” Malgré cette appréciation, je ne fus pas admis à poursuivre la formation d’EOR, ce dont je ne fus pas déçu. Il m’aurait fallu partir sans tarder à Cherchell, en Algérie, où se formaient, pendant six mois, les futurs sous-lieutenants. Le 17 décembre je réintégrais le 21 Bataillon de chasseurs à pied à Granville. Retour à la case départ. Noël en famille à Chérancé, puis affectation à l’ESMIA[3] à Coëtquidan. Le capitaine commandant le ” groupe Ecole ” m’affecte au Cabinet du Général Craplet, commandant de l’Ecole Saint Cyr. Banal travail de secrétariat qui me laisse du temps libre pour lire. Organisation de manifestations, réceptions, préparation des Baptême et ” Triomphe ” des promotions : tout cela ne me plaît guère et me met assez fréquemment en sourde opposition avec l’aide de camp du général.

                          Secrétaire au cabinet du général

Le 22 avril 1961, trois généraux prennent le pouvoir à Alger, Salan, Jouhaud et Zeller. Le quartier est consigné, les permissions annulées. Sur les postes à transistors on écoute les nouvelles d’Alger. Par Jacques Trohel, ancien élève du collège Notre-Dame de La Flèche, et Elève Officier d’Active à Saint-Cyr, je sais que beaucoup des élèves sont opposés à la politique du Général de Gaulle. D’ailleurs certains ont eu l’audace et le courage d’exprimer leur opinion. Deux d’entre eux ont été exclus de l’Ecole, voyant ainsi toute leur carrière annihilée.

            En tant que secrétaire au cabinet du général, je reçois beaucoup de notes de service. L’une d’elles retient particulièrement mon attention : elle demande à des appelés de se porter volontaires pour des postes d’instituteur au Sahara.  Au Sahara ! Je rêve… A la mi-juin je fais ma demande de mutation pour le Sahara. C’est vraiment l’inconnu. On semble cependant s’intéresser à ma candidature puisque quelques jours après, je suis convoqué à une visite médicale qui confirme mon aptitude au Sahara. Désormais j’envisage le futur dans ce camp de Coëtquidan avec plus d’optimisme, et les exercices imposés me paraissent moins pénibles : tir au F.M, parcours du combattant sous tirs à balles réelles, tir de roquettes antichars… A ce sujet, une anecdote : nous utilisions pour ces tirs contre des chars passablement délabrés, des roquettes dont l’étui cartonné comportait la mention ” à n’utiliser de préférence qu’en métropole “. C’est dire la fiabilité de ces armes ! D’ailleurs une sur trois parvenait à fuser du tube de lancement, ce qui obligeait le lieutenant à désamorcer le fils de contact, manœuvre assez périlleuse…

            Fin juillet, je bénéficie d’une permission de départ en A.F.N. Je fais valider mon billet SNCF Rennes-Chérancé via Grasse. Ainsi je peux aller rendre visite à ma tant Clémence qui habite le vieux Grasse. Quelques jours en compagnie de ma tante préférée et découverte d’un pays magnifique, Bourdon, Gorges du Loup, Vence, Eze- sur- Mer…

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

3/10 : L’Algérie en attendant le Sahara

Le jeudi 24 août 1961, à 11 h, j’embarquai à Marseille sur le ” Ville d’Oran “, bateau de transport de troupes. La nuit se passa au calme dans l’un des entreponts. Et, au soleil levant du lendemain matin apparut «El Djézaire », «Alger la Blanche « . Le spectacle est magnifique mais nous n’avons guère le temps de le contempler… Débarquement puis transport en camion au 110ème QG à El Biar, dans la banlieue d’Alger sur la route de Blida. Ce quartier est une briqueterie désaffectée, et nous allons dormir dans un garage à voitures largement ouvert aux courants d’air. Dès le lendemain matin, un dimanche, je me retrouve en patrouille armée dans la campagne environnante. L’exercice se termine à 9 heures. Gabriel Ducros, un cousin, vient me chercher au QG et m’emmène chez lui où je fais connaissance avec Josette, son épouse, et leurs deux filles. Baignade à la plage de la Madrague, puis retour par la corniche, visite de la ville d’Alger, déjeuner à la maison puis baptême à El Biar dans une famille d’Espagnols … Vraiment une autre vie que celle que je connaissais. Grâce à l’influence de Gabriel qui travaille au “3ème Bureau “, je suis affecté au Commandement Interarmées au Sahara (CIS) comme secrétaire au Service Général. Ce CIS est implanté dans la villa Revol, au cœur d’El Biar. Décidément ce type de travail me poursuit ! Pour l’instant, il n’est pas question du Sahara, sinon dans l’appellation du Commandement… Ma tenue reste kaki mais je change d’étiquettes : épaulettes rouges avec galons, calot rouge, badge “Sahara” sur la manche, mais je ne vois pas la couleur du sable de l’erg…

                              Bouclage de la ville d’Alger

Les premiers contacts avec Alger, à bord d’une jeep, montrent une présence importante de troupes, surtout dans le quartier de Bab el Oued. Le soir, l’OAS manifeste bruyamment : klaxons, gamelles, sifflets, cris ” Algérie Française “. Se hasarder, la nuit, dans les rues d’Alger devient périlleux et il est préférable de ne pas montrer son appartenance à l’Armée. Dans la nuit du 22 septembre, des coups de feu, des tirs de grenades, des explosions de plastic… Le quartier est consigné. Un piquet d’intervention est formé pour parer à toute éventualité.

            Le dimanche 24, Gabriel et sa famille quittent l’Algérie et rejoignent la métropole.  L’Etat-major décide le bouclage complet de la ville. Des barrages sont élevés sur toutes les routes ; il est difficile de se rendre sur les plages. Il apparaît que l’OAS s’en prend désormais à l’Armée. Au ” Petit Paradis “, baraquement en préfabriqué où nous logeons, situé au bord d’un ravin où grouillent un certain nombre d’animaux, la tension est forte chez les hommes de la compagnie. Une rafale de P.M est lâchée dans les fourrés… FLN ou OAS ? nul ne sait.

            C’est surtout le soir que nous sommes peu rassurés dans nos baraquements non conçus pour résister à une attaque, même très faible. Un soir de la fin septembre, deux pains de plastic explosent dans une villa près du CIS. Une grenade incendiaire provoque un incendie dans un tas de caisse. La compagnie de commandement est consignée. Le dispositif de protection des européens s’intensifie et atteindra début novembre jusqu’à 40 000 hommes de troupe à Alger et banlieue. Chaque soir et chaque nuit est désormais ponctué de nombreuses explosions. Des hélicoptères patrouillent au-dessus d’El Biar pour détecter l’émetteur pirate de l’OAS. Cela ne nous empêche pas de sortir au cinéma, au restaurant ou même de participer aux répétitions de la chorale paroissiale d’El Biar…

                             Recrutement d’un instituteur[JM1] 

Le premier novembre, les émeutes font 70 à 80 morts. A Alger même, 4 musulmans sont tués lors de manifestations pro-FLN. Le lendemain matin, une section du CIS participe à une cérémonie commémorative dans un cimetière européen, sur les hauteurs d’El Biar. Instants assez irréels : nous commémorons les morts de la dernière guerre alors que plus bas en ville les explosions retentissent… Nous rentrons par le chemin des crêtes.

            Au Service Général, comme au cabinet du général commandant Saint-Cyr, je suis rapidement informé des circulaires et notes de service qui paraissent. A la mi-décembre, je suis ainsi informé que l’état-major recrute un instituteur pour Tabelbala, une oasis de l’Ouest Saharien. Je rédige aussitôt ma demande et la dépose sur le bureau de l’aide de camp du général.

Le samedi 16 décembre, alors que, avec quelques camarades, nous nous promenons rue Michelet, une explosion, revendiquée par un commando anti-OAS, ravage un bar activiste. Sur une trentaine de mètres, les vitres des magasins sont brisées. Dans les décombres de son commerce, le propriétaire sert ses clients sous une pancarte ” magasin victime du gaullisme “, au son de la ” marche des africains “. Les passants crient des slogans hostiles à l’armée française. Les photos que j’ai prises de l’événement ne sont jamais revenues du laboratoire de Sevran qui en assurait le développement, subtilisées sans doute par la censure ou un sympathisant local de l’OAS ?

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

4/10 : Avis de mobilisation générale

Pour Noël, les sommets du Djurjura sont blancs de neige… Le soir du 24 décembre, j’assiste à la messe de minuit à la paroisse d’El Biar, puis avec quelques copains, nous réveillonnons dans un des bureaux de la villa. Les explosions sont fréquentes, mais, sous la garde armée de quelques-uns, nos festivités se déroulent dans une relative sérénité.

L’Algérie a donc connu, hélas ! un Noël sans paix. Tandis que le monde entier célébrait dans la joie la fête de la Nativité, le sang et les larmes ont continué de couler de l’autre côté de la Méditerranée. Et dans d’innombrables familles françaises l’absence de l’enfant qui est “là-bas” a été profondément ressentie. Non plus que la paix, la joie de Noël n’a pas été partout totale. Les rois mages, en route vers la crèche apporteront-ils l’espoir qu’il en sera autrement pour un prochain Noël “ ?  (La Dépêche du Maine, Noël 1961)

                                  Tenue de combat et casque lourd

L’année 1961 s’achève dans l’inquiétude et dans l’espoir d’une solution à ce conflit. Nous sommes chargés des “opérations de maintien de l’ordre”, mais ce pléonasme cache la réalité d’une guerre évidente où s’affrontent trois belligérants : l’OAS qui veut le maintien de l’Algérie Française, les Algériens qui, par FLN interposé, luttent pour leur indépendance, et entre les deux, l’armée française dont la position est de plus en plus délicate.

Le 5 janvier, on parle en ville d’une mobilisation des troupes de l’OAS. Intoxication ? A la radio, une émission pirate confirme cette rumeur. Dès le lendemain matin, un piquet d’alerte est constitué pour la défense du cantonnement. Chaque homme revêt la tenue de combat, coiffe le casque lourd et se voit attribuer un P.M chargé. Deux par deux, nous patrouillons dans les rues autour du camp. Le soir ce dispositif de sécurité et de défense est remis sur pied. Les hommes de troupes dorment habillés, l’arme à proximité.

Dans la nuit de jeudi, des affichettes ont été placardées dans la plupart des quartiers européens d’Alger. Bordées de tricolore et portant deux drapeaux croisés, elles s’intitulent “Avis de mobilisation générale” et sont signées Raoul Salan, commandant en chef. Un certain nombre de ces affiches ont été détruites avant l’aube, mais, dès les premières heures de la matinée, cette “mobilisation générale” faisait l’objet de toutes les conversations dans la ville. Beaucoup rapprochent l’éclosion de ces affiches de certains “messages personnels” diffusés dans l’émission pirate de la veille.

                                    Réalité quotidienne des attentats

Il y a bien longtemps que l’on parle de mobilisation à Alger. Avant le 1er janvier, disait un tract déjà ancien, 100 000 hommes devaient être mobilisés. Cet affichage est en tout cas un acte spectaculaire qui ancrera davantage le plus grand nombre dans le sentiment que le pouvoir de R. Salan est non seulement le pouvoir de fait, mais le seul pouvoir légal. Dans les conversations, évidemment, on envisage l’éventualité d’un prochain putsch ; les ménagères se passent la consigne : faites des provisions pour six jours. Pourquoi six jours ? Mystère ! Mais il est de bon ton de paraître renseigné.

Les autorités ne paraissent pas être très émues de cet avis de mobilisation et le service d’ordre ne semble pas particulièrement renforcé. Il est vrai que, depuis quelques jours, il est très important. Malgré cela, malgré aussi les annonces d’un proche cessez-le-feu, la ville n’est pas plus fiévreuse que de coutume. On voit même dans ces chaudes journées les jeunes gens et jeunes filles se baigner et se dorer au soleil. Mais sur le boulevard proche on entend quand même les hurlements des ambulances qui rappellent la triste réalité quotidienne des attentats.” (Journal “La Croix” 06-01-1962)

Ma fonction au Service Général est d’organiser le logement des officiers et sous-officiers qui transitent par Alger avant de rejoindre leur poste au Sahara. Pour cela, quelques chambres leur sont proposées, dans l’enceinte de la villa. Nettoyage et aménagement de ces chambres font partie de mes attributions. Il m’arrive également d’effectuer le convoyage de ces officiers entre l’aéroport de Maison-Blanche et le CIS. Un soir de janvier, la jeep qui m’emmenait chercher un officier à Maison-Blanche tomba en panne en plein Bab el Oued, le quartier arabe. Par bonheur, une patrouille de zouaves nous protégea pendant la réparation.

Les jours s’écoulent, occupés à des activités militaires diverses : gardes au poste d’entrée, piquet d’intervention, exercices d’alerte, tir au P.M à Béni Messous… Nous prenons cependant le temps de descendre en ville vers des lieux reposants : le balcon Saint Raphaël d’où la vue sur Alger est magnifique, le Jardin d’essai, la basilique Notre-Dame d’Afrique, vénérée également par les musulmans : il n’est pas rare d’y croiser des femmes voilées qui prient Myriam…

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

5/10: Le Sahara

A la mi-janvier, ma demande de mutation prend forme. Mon remplaçant arrive en même temps que l’avis officiel de mutation : je suis affecté à la Compagnie Méhariste de la Saoura à compter du 1er février 1962.

Le vendredi 26 janvier, après les formalités d’embarquement puis deux incidents techniques qui obligent l’avion à se poser, je quittai vers 17 heures le sol algérois à bord d’un avion de transport de troupes, un “Nordatlas”, dont la double queue est caractéristique. Le temps est magnifique et permet une approche exceptionnelle du désert saharien vu du ciel.

                           Touaregs, Maures et Chambi

Atterrissage à Reggan vers 20 h 30. Un camion nous emmène à la base militaire, Jean-Marie Ploux et moi. La nuit est extrêmement froide et les épaisses couvertures ne sont pas superflues. Le lendemain nous visitons l’Etat Major et l’escale aérienne de la base, et découvrons l’oasis de Reggan, à une dizaine de kilomètres de la base. Commence alors la découverte de cette petite palmeraie avec ses jardins irrigués, ses maisons en torchis. Les dunes du désert du Tanezrouft enserrent le petit village. C’est également la première rencontre des autochtones, Touaregs, Maures, Chambi ? Je ne sais encore. Les enfants, à proximité des cases en pisé, courent après nous. Certains plus jeunes restent assis à l’entrée des habitations, le regard triste, les yeux et la bouche infestés de mouches ; les femmes en gandourah bleu anthracite vaquent à leurs occupations, le regard fuyant…

Après ces quelques jours de première approche de la vie saharienne, je quitte la base de Reggan pour Colomb Béchar en utilisant le même moyen de transport, le Nordatlas. C’est l’après-midi. Un fort vent malmène l’appareil et rend malades les passagers. Le logement à Colomb Béchar s’effectue dans les baraquements d’un immense camp de passage. Colomb Béchar est en effet la base arrière qui dessert les troupes de la Saoura et toute la Z.O.S, la zone Ouest du Sahara, entre Maroc, Mauritanie et Mali. Pendant une semaine – le temps qu’un avion soit complet pour partir – c’est l’inactivité, les sorties “en ville”, la découverte de cette ville-base militaire. Jusqu’au matin du mardi 6 février où un C47 s’envole avec quelques passagers et un fret important vers Tabelbala. Après une heure de vol, l’avion atterrit sur une piste sommaire, terre et sable.

                                 Affecté au dépôt s’essence

Tabelbala est une agréable oasis à la limite de l’erg Er Raoui et au pied du Kahal Tabelbala, massif montagneux dont la roche est noircie par le soleil. La CMS (Compagnie Méhariste de la Saoura) est hébergée dans un bordj clos de murailles en terre cuite. Des “koubbas” aux coupoles blanches, peintes au kaolin, abritent les divers services inhérents à toute compagnie saharienne : popote, logement des troupes et des cadres, radio, poste de commandement. Bref, c’est une caserne, mais en plein désert.

Après le circuit administratif habituel et la visite d’incorporation, je suis affecté par le capitaine Cosse, commandant de la CMS, au dépôt d’essence ! J’avais fait tout ce trajet, sur une quinzaine de jours, pour me retrouver pompiste ! La déception fut amère, mais après tout, mon désir le plus ardent était de connaître le désert. J’étais maintenant dans le vif du sujet. A l’ami Ploux revint le poste d’instituteur des enfants du village proche du bordj. Sa “classe” se trouvait dans l’oasis, à quelques centaines de mètres du bordj. Je me souviens d’un Jean-Marie, heureux lorsque, après sa journée d’école, il rentrait au bordj, en flânant, dans la contemplation intime du désert.

                                       Les Maures Réguibat

Pour me consoler, si je puis dire, le capitaine m’attribua deux heures de cours par jour, cours de français aux harkis et commissionnés de la compagnie. Ma première expérience d’enseignant commença ainsi, dans la salle du réfectoire, avec une quinzaine de méharistes désireux d’apprendre le français écrit, des Chambi bien sûr, mais aussi quelques Maures Réguibat, ces nomades aussi magnifiques que les Touaregs.

Les Réguibats descendent des Berbères Sanhaja, habitants primitifs de cette région. Les populations du Sahara occidental étaient organisées en tribus distinctes et présentaient une assez grande diversité. Malgré cette diversité, ces populations avaient aussi de nombreux traits communs, s’expliquant par leur histoire, leurs contacts, la nature du pays et les conditions climatiques. Elles menaient un genre de vie pratiquement identique, fondé sur la nomadisation. Elles se déplaçaient constamment avec leurs troupeaux à la recherche de pâturages.

Précisons que les Réguibats avaient une solide réputation de guerriers. Les historiens de l’AOF soulignent les luttes fréquentes entre les tribus et les expéditions périodiques de razzia et de pillage des villages. Les tribus Chambi et Réguibats formaient un corps régulier de l’armée française et non un corps de supplétifs comme les goums[4]. Ces hommes de troupe étaient des Sahariens, engagés pour deux ans. Ils vivaient sur leur solde, pour leur nourriture et leur entretien. De fait, ils devaient se procurer eux-mêmes deux méhara et leur harnachement. Les effets militaires étaient fournis par le magasin d’habillement de la compagnie mais décomptés de leurs pécules. De la même façon, les jeunes appelés du contingent touchaient mensuellement une solde assez importante mais avec laquelle ils devaient s’habiller et se nourrir. Chaque mois avait lieu “l’Awouine” où chaque méhariste achetait vêtements, conserves et thé avant de partir en nomadisation aux confins de la Saoura et du Maroc.

Les tribus Réguibat avaient des activités économiques semblables : élevage, commerce, chasse ou pêche, parfois un peu d’artisanat et de culture. Il en était de même pour leurs coutumes, leur alimentation, leurs vêtements, leurs parures, leurs fêtes et leurs jeux (poésie, chants, musique, danse). Elles donnaient une instruction rudimentaire à leurs enfants, grâce à des maîtres (taleb) qui leur apprenait à lire le Coran et à écrire. Elles pratiquaient la même religion, l’islam, et y étaient très attachées. Elles parlaient la même langue, le hassanya, dialecte proche de l’arabe classique apporté par les Arabes.

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

6/10 : Enfin, maître d’école, presque !

Par décision du capitaine, je devins ainsi le “taleb” de ces “élèves” adultes dont le statut était particulier : en réalité, ils étaient salariés de l’armée française, et donc combattaient les rebelles du FLN… Les Chambi rejoignaient leur maison dans le village et les Réguibats campaient à proximité du bordj dans leur Khaimas[5], avec femmes et enfants. Mes promenades du soir ou du dimanche m’ont souvent conduit vers leur campement. Et j’étais invité, assis sur des tapis, à boire les trois verres de thé à la menthe, selon un rite immuable : la bouilloire sur un petit feu de bois alimenté par la femme, la boite de thé chinois en fer blanc, la poignée de menthe fraîche récoltée dans le jardin de l’oasis et le pain de sucre conique que l’on casse à l’aide du cul d’un verre. Trois verres, en effet : le premier très sucré ; on rajoute de l’eau bouillante dans la théière pour le deuxième verre puis le troisième verre. On savoure en silence, à l’entrée de la tente, dans la contemplation muette du paysage minéral. Sur la hammada [6]déserte où se détachent quelques zéribas[7] et d’autres Kheimas, des silhouettes se découpent. On se salue : “salamaleikoum ! Aleikoum salam !” Venant du village proche, des voisins s’acheminent vers leur tente.

                                 Flâner dans l’oasis

A la mi-mai, je délaisse la chambrée pour m’installer au bordj Claverie, situé sur une colline à proximité du poste de commandement. Je dispose d’une chambre individuelle, près de l’atelier de réparation des 4/4 et camions du peloton porté, je suis ainsi disponible pour répondre aux demandes de plein d’essence…

A la CMS, pas de permissions. Où irions-nous ? Quand le travail est fait, les méharistes ont quartier libre. Nos randonnées nous conduisent généralement vers l’erg qui domine à l’horizon lointain. Pour parvenir au pied des immenses dunes, il nous faut traverser la hamada, plateau caillouteux et désertique, à l’horizon duquel se profilent les dunes rosâtres. La marche en naïls[8] est rendue pénible en raison du fesh-fesh, qui craque sous les pas. Plus fréquemment, nous allons flâner dans l’oasis, dont la verdure et la fraîcheur détendent de journées parfois bien chaudes.

A quelques kilomètres du bordj se situe l’ancien ksar[9] Tabelbala, aujourd’hui en ruine mais qui, situé sur un piton rocheux, témoigne d’un passé de résistance aux tribus qui empruntaient ce couloir entre l’erg El Atchane et le Kahal Tabelbala. Il est fréquent que lors de nos sorties nous découvrions des vestiges archéologiques, pointes de flèches et bifaces en particulier. Autres témoignages d’un passé beaucoup plus ancien où la région était verdoyante, riche de cultures et de gibier…

                           Les foggaras, canalisations souterraines

Autre attraction des marcheurs, les foggaras,[10] ces canalisations souterraines qui, sur des kilomètres, acheminent l’eau douce de la nappe phréatique vers les jardins de la palmeraie. Il n’est pas possible en effet d’utiliser l’eau saumâtre des puits de l’oasis ; elle est cependant pompée pour remplir la piscine du bordj. Une foggara peut avoir un développement de 2 à 10, voire 15 kilomètres. Les canalisations suivent une pente légère (quelques millimètres de dénivelé par mètre) et courent à environ 5 ou 10 mètres sous la surface du sol, jusqu’à arriver à fleur de sol dans les jardins. La foggara proprement dite a un diamètre suffisant (1 m à 1,20 m) pour permettre le déplacement d’un homme courbé, travailleur progressant d’aval en amont au moment du percement, et ouvrier circulant pour effectuer des travaux d’entretien. En surface, les cônes de déblais ou les ouvrages maçonnés jalonnent le trajet de la foggara (et de l’eau) entre la nappe et le bassin de réception. Construits tous les 12 à 15 mètres, ces cônes protègent l’orifice en même temps qu’ils permettent de surveiller l’écoulement et, au besoin, de descendre dans la foggara pour déblayer le point précis de la galerie qui viendrait à être obstrué. Quelques-unes de ces constructions sommaires subsistaient encore sur les foggaras de Tabelbala en 1962. Que sont-elles devenues 50 ans après ? Au débouché de chaque canalisation dans la palmeraie, l’eau est reçue dans de petits bassins. Son débit est soigneusement mesuré avant qu’elle ne reparte pour être parcimonieusement redistribuée entre les jardins, moyennant le versement d’un écot par les propriétaires. A la sortie du bassin de réception, l’eau passe alors par une “chebka” (= grille), qui est une plaque de cuivre – ou de terre cuite – percée de trous, le “kassis” ou “kesra” (= peigne), dispositif répartiteur, qui permettra la redistribution de l’eau de la foggara calculée en doigts ou en demi-doigts, selon le cas ; elle peut alors s’en aller par de minuscules rigoles (“seguia “) qui parcourent la palmeraie et la conduisent vers les jardins.

Ces extraordinaires systèmes de captage et d’adduction d’eau d’irrigation existent depuis le 1ersiècle de notre ère selon le modèle existant dans certaines régions de la Mésopotamie. Pour couvrir les besoins en eau et lutter contre l’aridité importante de la terre sans laisser prise à l’évaporation, parfois considérable dans le Sahara, il fallait en effet trouver un moyen d’irrigation adapté.

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

7/10 : le chameau à tout faire

Autre curiosité incongrue dans ce désert : des carcasses de fusée, laissées par le centre de tir d’Hammaguir[11]. L’un des méharistes récupérait d’ailleurs les écrous et vis qui restaient sur les tôles… Bricoleur dans l’âme, il réparait tout ce qui pouvait l’être, cafetières, postes à transistors… Avec ces carcasses, il pouvait assouvir sa passion du bricolage.

Fin février de cette année 1961, un fort orage s’abat sur la région. Le fait est rare, évidemment, une fois tous les dix ans, mais c’est une vraie catastrophe dans le village dont l’argile des maisons résiste mal aux 15 mm d’eau déversés en peu de temps. La piste du terrain d’atterrissage est totalement détrempée et le C 47 qui achemine toutes les semaines courrier et ravitaillement ne peut se poser. Les réserves dans les chambres froides sont épuisées, de même que la farine nécessaire à la fabrication du pain. Il est impératif de trouver un moyen de subsistance. Nous sommes réduits, la mort dans l’âme, à abattre un jeune chameau du peloton méhariste.

                                                   Vive le chameau !

Dans cette société de pasteurs sahariens, le chameau est évidemment primordial pour la survie. Avec un estomac pouvant contenir deux cent cinquante litres d’eau, le chameau peut voyager sans boire cinq jours durant pendant les jours les plus chauds de l’été, ou sept jours en hiver si les pâturages sont abondants. Il est capable de parcourir soixante kilomètres par jour, avantage considérable étant donné la rareté et la dispersion des pâturages. Le chameau est également une excellente bête de charge, tant pour les migrations des nomades que pour le transport de marchandises sur de longues distances, puisqu’il peut porter jusqu’à 150 kilos.

Rappelons aussi que les nomades utilisent les poils du chameau pour fabriquer leurs tentes (kheimat) et la peau pour faire du cuir et orner leurs armes. Quant au lait de chameau – une femelle en produit environ 6 litres par jour et jusqu’à douze litres pendant les six mois d’allaitement – il constitue l’élément de base de l’alimentation des nomades. Le chameau est également une très bonne monture de combat – comme dans les compagnies méharistes – une monnaie d’échange, et, en plus du sel extrait dans les sebkhas sahariennes (salines), le principal “produit d’exportation” des nomades. Les nomades élèvent aussi des chèvres dont ils utilisent le lait, la viande, la peau et les poils.

Les produits fournis par les chameaux et les chèvres ne suffisaient pas à couvrir les besoins des nomades. Ainsi, fréquentaient-ils les centres marchands tels que Tindouf et Goulimine, au nord du Draa, pour y échanger leurs chameaux, ou leur laine et leurs peaux, contre des “marchandises d’importation” comme des céréales, du thé, des pains de sucre, des armes et autres produits manufacturés.

                                      La gazelle au regard émouvant

Ils participaient aussi, en tant que guides, escorteurs ou commerçants indépendants, au commerce caravanier sur de longues distances qui, selon les époques, transportait des biens précieux tels l’or, les esclaves, les plumes d’autruches et la gomme arabique, de la savane et des forêts au sud du Sahara aux marchés du Maghreb et d’Europe et, en sens inverse, des biens manufacturés tels que du tissu.

Tuer un chameau pour se nourrir est donc une solution de dernier recours. Il est nécessaire de trouver un autre moyen de se nourrir en attendant la prochaine livraison aérienne de vivres frais. On part en 4/4 à la chasse à la gazelle sur la hamada. Cruelle chasse ! Les magnifiques animaux, pourtant très rapides, ne peuvent résister à l’assaut des Dodges et aux balles des fusils de guerre. Si la mort par balle ne survient pas en raison de la maladresse des tireurs, c’est alors l’effondrement de la bête dont le foie éclate ! Il faut alors achever par balle une gazelle dont le regard émouvant semble comprendre le sort qui lui est réservé.

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

8/10 : Les accords d’Evian

Ce 19 mars, suite aux accords d’Evian, le cessez-le-feu est proclamé. Le capitaine commandant la Compagnie veut solenniser la circonstance en organisant une prise d’armes dans la cour du bordj. Discours sur les valeurs de la France et tout ce qu’elle a apporté en Algérie depuis 1830, drapeau en berne, minute de silence… Ce cessez-le-feu qui prépare les algériens à leur indépendance est transformé en une défaite historique de la France. A travers les propos du capitaine, on sent bien son attachement à l’Algérie Française et sa tristesse de voir la fin programmée de cette glorieuse époque de colonisation.

Au bordj, rien ne change vraiment, la vie suit son cours. Cependant le vendredi 23 mars, et c’est le signe d’un prochain départ, le dépôt d’essence est partiellement liquidé. Les fûts vides sont chargés sur d’énormes camions Berliet et acheminés vers Colomb Béchar. Une importante réserve est cependant gardée pour alimenter les avions de passage et les véhicules du peloton motorisé.

Le dimanche 8 avril, comme le prévoyaient les accords d’Evian, un référendum appelle la population autochtone à voter pour ou contre l’Algérie indépendante. On a beaucoup dit sur ce référendum, en particulier sur la couleur, verte et rouge, des bulletins de vote, sachant que la couleur préférée des algériens est le vert…

                             Surveillance de la piscine

Le dimanche 22 avril, jour de Pâques, le père Janssens arrive à la palmeraie aux commandes de son “Broussard”. Ce prêtre hollandais vit depuis plusieurs années dans l’ermitage du Père de Foucauld à Béni Abbès et visite régulièrement ses ouailles avec son petit coucou. Le matin, messe au réfectoire puis inauguration du nouveau “foyer du méhariste”. Chacun sait pourtant que la présence militaire dans le bordj est en sursis et qu’il nous faudra, un jour proche, déménager pour ne plus revenir.

Depuis plusieurs semaines la piscine du bordj a été remise en état. On y a pompé de l’eau saumâtre et le bain est désormais un passe-temps bien agréable qui permet aux hommes de troupe de ne pas “glander” sur leur lit dans les chambrées. Ce dimanche de Pâques, je me retrouve de surveillance à la piscine, sage précaution du commandement pour éviter les ennuis dus à l’excès d’apéritif offert en ce jour de Pâques.

                           L’absent noyé au fond de la piscine

Le vendredi 11 mai, en présence du général commandant les troupes au Sahara, les deux pelotons méharistes sont accueillis au bordj. Partis depuis plusieurs mois patrouiller dans l’erg Er Raoui jusqu’à la frontière marocaine, ils reviennent à leur base pour reconstituer bêtes et gens que trois mois de nomadisation ont quelque peu malmenés, mais aussi en raison du récent référendum où la population a voté pour l’indépendance. Prise d’armes puis fantasia des méharistes, spectacle fascinant de cette charge des méharis contre un ennemi fictif, fusil brandi et coups de feu en l’air… Pour l’occasion, le commandant a invité un peloton de légionnaires basé à Colomb Béchar. Après avoir participé à la prise d’armes et défilé devant le général, c’est le moment de la détente qui voit méharistes et légionnaires se ruer au foyer du méhariste pour y étancher une soif que la température torride a accentuée. La chaleur incite chacun à se baigner. Le soir le lieutenant commandant le peloton de légionnaires fait l’appel de ses hommes. L’un d’eux manque à l’appel. Tout le monde se met à sa recherche, y compris dans le village proche. Ce n’est qu’à la tombée de la nuit qu’on le retrouve, noyé, au fond la piscine… Ses camarades l’habillent, le juchent sur l’un des 4×4, le recouvrent d’une toile et reprennent la piste vers Béchar.

                                               L’Aïd El kébir

Il semble que le commandant, à l’approche d’un départ proche de la compagnie, fasse tout pour affirmer de façon évidente la présence française sur cette terre, même s’il est persuadé que la souveraineté française sur cette portion d’Afrique est bel et bien révolue. Après le retour des méharistes, une nouvelle occasion s’offre à lui : la fête musulmane de l’Aïd El Kébir[12]. Toute la compagnie est là, pelotons montés et portés, musulmans et roumis (chrétiens), occasion unique et ultime de faire la fête et de célébrer d’une certaine façon le lien entre français et algériens. Un immense méchoui est préparé par les chambis et servi à la koubba [13]des sous-officiers. Chacun est assis sur des couvertures de méharistes tandis que l’on sert l’anisette aux non musulmans. Puis on se rassemble autour des chèvres rôties que l’on taille en morceaux. Suivent le couscous, le thé à la menthe. Sous une tente réguibat, les hommes vont danser jusqu’à une heure avancée.

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

9/10 : le salaire de la peur

La veille, jour de Pentecôte, la compagnie avait pris une journée de repos. Le soleil qui écrasait les dunes de l’erg Er Raoui avait calfeutré une bonne partie de la troupe dans les chambrées. Rares étaient ceux qui osaient s’aventurer sur la place d’armes, même l’ombre des koubbas ne procurait que peu de fraîcheur. La nuit avait cependant rafraîchi l’atmosphère, procurant une agréable sensation de bien-être.

Ce lundi de Pentecôte avait commencé comme un jour ordinaire avec ses tâches à réaliser sous la même chaleur accablante. Un jeune récemment arrivé au bordj avait dû être évacué vers Alger par un C 47 venu spécialement le rapatrier vers des horizons plus cléments.

                                                           Chicaya

Soudain, en fin de matinée, des bruits confus parviennent du village qui jouxte le Bordj. L’une des sentinelles postées aux quatre angles des remparts envoie prévenir le capitaine Cosse. qui fait sonner le clairon et ordonne à chacun de prendre armes et chargeurs de cartouches. Chacun des méharistes obtempère à l’ordre, ignorant ce qui se passe à l’extérieur et craignant une attaque d’un commando de la Willaya 3. Mais aucune détonation n’a retenti. Par-delà l’enceinte du bordj parviennent des cris, des échauffourées… Cinq hommes sont désignés et, sous le commandement d’un lieutenant, sortent du bordj puis se dirigent vers le village.

En réalité, une chicaya [14]entre Maures Réguibat et Chambis a mis en émoi tout le village et la compagnie. Pour faire bref, disons que le caïd des Chambis veut prendre la femme de l’esclave noir d’un Réguibat. Quelques membres de la tribu réguibat tombent sur les Chambis à bras raccourcis, mais la femme est emmenée à la CAS. Le lieutenant commandant la CAS est menacé par les Maures. La femme est transférée à la mairie et de là, le caïd maure la prend chez lui. L’esclave noir vient se plaindre à la CAS et auprès du médecin. Maures et Réguibat en viennent aux couteaux. La compagnie méhariste est en état d’alerte, puis on parlemente et tout rentre dans l’ordre qui est celui de la coutume, non celui du droit… Il faut en effet préciser qu’à cette époque, les Réguibat achetaient encore des esclaves noirs, venant d’Afrique Occidentale (actuel Mali) par les routes du sel, afin de garder leurs troupeaux de chameaux. En 1960, un esclave valait 6 chameaux, une fortune ! Le Maure avait tout droit sur son esclave et sa famille. L’administration française, pour ne pas s’attirer d’ennuis avec ses fidèles goumiers, fermait volontiers les yeux sur ces pratiques contraires aux droits de l’homme…

                       Tinfouchy, le bagne des soldats du refus

A Tinfouchy, la CMS gérait un bordj, essentiellement un dépôt d’essence pour le ravitaillement du peloton porté, et une section disciplinaire qui accueillait des jeunes appelés récalcitrants au service armé, “soldats du refus”, délinquants, antimilitaristes, opposants politiques, généralement communistes, objecteurs de conscience… Il faut rappeler que le statut d’objection de conscience n’a été mis en place qu’après 1962. Le bordj Tinfouchy fut pour ces jeunes un véritable bagne d’où toute tentative d’évasion était impensable. Ils étaient soumis à une discipline rigoureuse et, à toute tentative de rébellion, enfermés dans une baraque en tôle, située en plein soleil au centre de la cour du bordj.

Nous étions à quelques jours de l’indépendance de l’Algérie. Il fallait penser à quitter les bordjs, casernes et fortins sans laisser quoi que ce soit à l’ALN [15]qui prendrait la suite en occupant les lieux. Le capitaine commandant la compagnie décida d’envoyer à Zegdou une escouade chargée de ramener les fûts d’essence et de kérosène à la CMS. Comme responsable du dépôt d’essence, je fus chargé de coordonner l’opération de transfert des fûts. Nous partîmes le 29 juin à 10 heures du soir avec un camion Berliet “gazelle” et deux GBO. Afin d’éviter la barre montagneuse infranchissable du Kahal Tabelbala, le trajet imposait de prendre la piste de Béchar qui remonte vers le nord puis, aux Oglats Béraber, d’obliquer vers l’ouest afin d’atteindre Zegdou à la frontière du Maroc. Le trajet de nuit permettait de ne pas souffrir de la chaleur. A 1 heure du matin, nous nous arrêtons au col Robert et dormons dans les camions. Nous repartons vers 7 heures et arrivons à Zegdou à 1 heure de l’après-midi. Le chargement des 200 fûts s’effectue dans l’après-midi du samedi et le dimanche.

                           Enlisement sur la piste

Le retour, dès le lundi matin 6 heures, laissait facilement penser à une opération de routine, mais une heure après notre départ, un camion, malmené par la piste, laisse tomber trois fûts qu’il faut remonter sur le plateau. Le pneu avant du second camion crève. Réparation malaisée sous la chaleur torride. Après des kilomètres de hammada sans d’autres ennuis, nous parvenons aux dunes qu’il faut franchir sur une piste instable, essentiellement constituée de fesh-fesh. La piste est quelque peu étroite et demande au chauffeur une attention de chaque instant pour ne pas s’ensabler. Dans une légère courbe, le GBO de tête rogne le bord sableux de la piste et sa roue avant gauche va s’enliser irrémédiablement, provoquant une gîte inquiétante du véhicule. Nous sommes encore trop loin de Tabelbala pour appeler un camion de dépannage. Il nous faut dégager l’engin par nos propres moyens. A l’aide d’une rampe, les 1OO fûts sont déchargés sur le côté de la piste. La roue est dégagée du sable et l’on parvient à placer dessous les “plaques à sable”, puis le chauffeur reprend le volant avec quelque appréhension et remet son engin sur le dur de la piste. Les fûts sont remontés sur la plate-forme du camion. L’opération a duré 7 heures… Au moment de partir, l’un des gars, au moment de remonter dans la cabine se fait piquer au talon par un scorpion. Rapides soins d’urgence en attendant le retour. Vers 9 heures du soir nous repartons. A minuit apparaissent les lumières du bordj où nous nous sommes attendus avec impatience. Le blessé est soigné par le capitaine médecin. Fin d’une longue journée…

                                      L’indépendance

Le lendemain, mardi 3 juillet, la population du village fête son indépendance. Le drapeau du FLN, qui deviendra celui de l’Etat Algérien, flotte sur la mairie, la mosquée et au-dessous de la porte de chaque maison. Le village est en liesse. Nous évitons de nous montrer dans les rues.

Le bordj reste territoire français sur une terre désormais algérienne. Le 14 juillet sera fêté comme il se doit par une prise d’armes au bordj Clavery qui domine le village : présentation des nouveaux incorporés au drapeau de la Compagnie, défilé au monument aux morts puis au bordj d’en bas, sous l’œil narquois des indigènes et vin d’honneur offert par le commandant sous les arbres de l’espace de commandement.

Alors que chacun sait qu’il faudra remettre les bordjs à l’ALN, désormais autorité militaire du pays, curieusement, un contingent de 30 nouvelles recrues nous arrive par l’avion postal le mercredi 25 juillet. Dans quel but ? Nul ne sait. Mais ce qui nous préoccupe en cet instant, c’est que l’avion a oublié de nous acheminer les provisions pour la semaine. Il nous faut à nouveau tuer un chameau pour nourrir un effectif désormais passé à 90 soldats européens. Le cochon, grassement élevé et choyé par les soins de notre cuistot dans une case de l’oasis, est également sacrifié. D’ailleurs, que fût-il devenu après notre départ?

Témoignage : Algérie-Sahara (1960-1962)

10/10 : la quille

Le 15 août je participe à une sortie en piste pour aller ravitailler le peloton méhariste qui nomadise aux Oglats Béraber. La piste est connue, c’est celle que nous avions empruntée pour nous rendre à Zegdou. Les kheimats sont dressées sur la hammada et les chameaux sont baraqués ou paissent à proximité des tentes, à la recherche des moindres brins d’herbe séchée qui poussent entre les cailloux. Nous passons la nuit à la belle étoile, enveloppés dans le sac de couchage en épais drap militaire. Le ciel est splendide mais la nuit est froide. Au matin, sentant une curieuse présence contre ma cuisse, je sors doucement de mon sac et le secoue.  Une vipère à corne s’en échappe, venue sans doute se réfugier dans la chaleur de mon sac…

Les formalités de mon départ s’accélèrent : un ordre de libération arrive à la compagnie le 11 septembre, signifiant mon embarquement le 24 à Mers El Kébir. Visite médicale, remise du paquetage, arrosage de la “quille” avec les copains et le samedi 15, je prenais l’avion pour Colomb Béchar, quittant Tabelbala pour la dernière fois. Dernière vision, à travers les hublots de l’appareil : le village aligné autour de sa mosquée, l’oasis et les lignes visibles des foggaras, le vieux ksar, le Kahal Tabelbala, l’erg El Atchane, et puis, curieusement, dans une légère dépression de terrain, l’amoncellement gigantesque des canettes de bière et de Perrier entassées depuis des années, dérisoires déchets d’une armée d’occupation définitivement congédiée…

                             Le Ville d’Alger via Marseille

 Le district de transit de Colomb Béchar accueillait dans ses hangars les militaires en partance vers Oran. Il me faudra patienter jusqu’au vendredi 21 septembre pour prendre le train (“l’Inox”) vers Oran : une journée de voyage dans des wagons de 3ème classe au confort incertain. Aux arrêts dans les gares plus importantes, le train est gardé et surveillé étroitement par des gamins de 12/13 ans, vêtus de gandouras crasseuses mais armés de kalachnikovs neuves, chargeur engagé. Le District de transit d’Oran est la dernière étape avant de retrouver le sol de la France. D’immenses hangars avec des lits à trois niveaux, une nourriture qu’il faut gagner en jouant des coudes tant le commandement est désorganisé face au nombre des arrivants. Interdiction de sortir. D’ailleurs nous avons l’oreille rivée sur les haut-parleurs qui égrènent le nom et l’unité d’origine des rapatriés et leur bateau d’embarquement. Il était impératif de ne pas manquer l’information, sinon le temps de présence dans cet enfer s’allongeait. Mon nom fut enfin appelé le lundi 24 et j’embarquai dans les camions de transport vers le port de Mers El Kébir en traversant la ville d’Oran sous les huées des jeunes oranais qui assistaient avec joie au spectacle.

Le “Ville d’Alger” quitte le port le lundi 24 à 21 heures. Au large des Baléares il essuie une forte tempête. Beaucoup sont malades. Je délaisse le fond de cale où s’entasse la troupe nauséeuse et passe la nuit au grand air, sur le pont, exempt de nausées. Ce n’est que le mercredi 26 à 6 heures du matin que nous accostons à Marseille. En cette fin d’été marseillais, le temps est magnifique et ce qui frappe, après des mois de sécheresse et de chaleur, c’est la fraîcheur des couleurs, la douceur de l’air et puis un je-ne-sais-quoi qui me fait penser “je suis enfin rentré à la maison !” La fatigue et la tension des derniers jours, depuis le départ de Tabelbala, ne seront évacuées que plus tard, quand je retrouverai la ferme natale. Pour l’instant, il me faut trouver où habitent Guy et Odile avec lesquels j’ai entretenu pendant tout ce temps une correspondance bienfaisante. Un taxi m’amène chez eux. Heureuses retrouvailles ! Un bain me permet d’évacuer la crasse accumulée depuis des jours. L’après-midi de ce mercredi, nous partons à Grasse voir l’oncle et la tante Dubuisson et nous revenons à Marseille le vendredi pour que je puisse prendre le train de nuit vers Paris. Je débarque au Mans le samedi 29 à 10 h 30 et me rend à pied au 111 boulevard E. Zola, domicile de l’oncle et de la tante Micault, où m’attendent maman et Joseph qui me ramènent en voiture à Chérancé.

                                Paul  HUET (2020 )


[1] Conseil de révision :  Conseil chargé d’examiner dans chaque cantonlors du recrutement, si les jeunes gens appelés (les conscrits…) sont propres au service militaire.

[2] BCP : Bataillon de chasseurs à pied

[3] ESMIA : Ecole Spéciale Militaire Interarmes

[4] « goum » : terme arabe ancien qui signifie « tribu », « indépendance », et qui désigne à l’origine des nomades vivant libres et autonomes aux confins du désert, puis des soldats auxiliaires de l’armée française comme les goumiers

[5] La khaïma (la « tente » en arabe) est la tente traditionnelle utilisée par les nomades dans les zones désertiques et arides de l’Algérie, Mauritanie, Maroc et les pays du golfe persique. Dans la société sahraouie, le terme khaïma désigne aussi la notion de famille, foyer, voire la tribu. (source : Wikipédia)

[6] Une hamada, ou hammada, désigne un plateau rocailleux rencontré dans les régions désertiques telles que le Sahara. Elle est le plus souvent composée de calcaires lacustres ou de croûtes calcaires…

[7] Zériba : hutte en palmes.

[8] Naïls : sandales sommaires

[9] Ksar : village fortifié

[10] Foggara : voir croquis

[11] Hammaguir : base de lancement de fusées de Colomb-Béchar. Elle fut laissée à disposition des autorités françaises cinq années supplémentaires, après 1962, pour pouvoir poursuivre les essais en vol nécessaires à la mise au point des premiers missiles balistiques de la force de dissuasion et du lanceur spatial Diamant. Le site de Reggane, plus au centre du Sahara, était destiné aux tirs nucléaires.

La base est évacuée en 1967 conformément aux accords d’Évian. Parallèlement, et grâce à ce délai, Kourou, en Guyane française, prenait la suite immédiate sans interrompre ces programmes majeurs. (source Wikipédia)

[12] Aid el Kébir : fête musulmane qui commémore le sacrifice d’Abraham

[13] Koubba : habitation carrée surmontée d’un dôme

[14] Chicaya : querelle

[15] ALN : Armée de Libération Nationale


 [JM1]

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