Illustration. Quarante détenus auraient entamé une grève de la faim dans la prison El Harrach, à Alger. Illustration. Quarante détenus auraient entamé une grève de la faim dans la prison El Harrach, à Alger.AP Photo/Fateh Guidoum 01 fév 2022 Mise à jour 01.02.2022 à 19:38 par Benjamin Beraud

Trois cent trente-trois prisonniers politiques sont aujourd’hui détenus dans les prisons algériennes. Ils ont eu le malheur de participer au mouvement du Hirak. Une quarantaine de ces prisonniers d’opinion auraient entamé une grève de la faim depuis le 28 janvier dans la prison d’El Harrach à Alger. C’est ce qu’affirme des avocats et des médias algériens. Le Parquet d’Alger dément ces annonces.

Quarante détenus auraient entamé une grève de la faim dans la prison d’El Harrach ce vendredi 28 janvier. C’est l’avocat et membre du Collectif de défense des détenus d’opinion, Abdelghani Badie, qui a fait l’annonce sur le plateau de Berbère Télévision ce jeudi 27 janvier. Il affirmait que “cette action coïncidait avec le 64e anniversaire de la grève les huit-jours en 1957 (ndlr. dirigée par le Front de Libération National (FLN) pour l’indépendance de l’Algérie), et visait pour protester contre l’article 87 bis sur la base duquel ils sont accusés de terrorisme.

Plusieurs avocats et militants des droits humains ont confirmé le début de cette action de la grève de la faim le lendemain, vendredi 28 janvier, selon le site d’information Le Matin d’Algérie.

Dénoncer la systématisation des détention provisoires 

Depuis le début de l’année, plus d’une trentaine d’Algériens proches du Hirak, auraient été ainsi placés sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire, rapporte le média Le Matin d’Algérie. La procédure, qui vise à l’emprisonnement d’une personne avant son jugement, est devenue la règle dans la prison d’El Harrach.
 
En faisant une grève de la faim, ils dénoncent donc la systématisation de cette logique d’incarcération. Ils dénoncent les conditions de vie en détention. Ils sont soumis depuis deux ans, à l’instar des autres prisonniers, à une double peine, en les privant de la visite familiale et des paniers repas confectionnés par les familles, selon le média Le Matin d’Algérie. S’il y a eu une reprise depuis un an des visites familiales, l’interdiction du panier est toujours de mise.

Des arrestations en chaîne dénoncées par les associatifs

Ils seraient nombreux être détenus depuis la révolution du Hirak. Période symbolique de l’indépendance algérienne, le mois de février 2019 marquait le début d’une série de manifestation contre le pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika en Algérie, président algérien de 1999 à 2019. 

En plus de la trentaine nouveaux détenus en 2022 mentionnés précédemment, le Comité pour la libération des détenus (CNLD) recense pas moins de 333 détenus d’opinion ces derniers jours. L’organisation de défense des droits humains actualise chaque jour depuis deux ans sur sa page Facebook la liste complète des détenus et les peines encourues pour chacun d’entre eux.

Le dernier en date n’est autre que le rappeur Bilal Hemila. Il avait été arrêté jeudi et transféré à Tébessa à Alger ce lundi 30 janvier. Il est relâché et sera auditionné le 31 janvier. Face à ces accusation, le Parquet d’Alger dément toute affirmation.

Le Parquet d’Alger dément 

Dans une tribune publiée le lundi 30 janvier dans le même journal, soit deux jours après l’annonce de la grève de la faim, Le Parquet général de la Cour d’Alger réfute ces informations. Il dément à la fois la grève de la faim et le nombre de détenus d’opinion recensés. Le Parquet juge ces affirmations comme “tendancieuses”, dans “la mesure où aucun mouvement de grève” n’a été enregistré au sein de l’établissement pénitencier d’El Harrach, relève le site d’information Le Matin d’Algérie.

Elle va même plus loin. La cour d’Alger avertit qu’elle “pourrait engager la responsabilité pénale de ses auteurs dans la mesure où les informations de cette nature ont pour but d’impacter négativement l’ordre public et les institutions”, visant ainsi directement le Collectif de défense des détenus d’opinion et le journal Le Matin d’Algérie. Ce site d’information indépendant succède au quotidien Le Matin, qui avaitété fermé en 2004 par les autorités algériennes.

Difficile de dire avec certitude si ces détenus ont bel et bien entamé une grève de la faim. Toujours est-il que ce ne serait pas la première en date. Vingt-trois détenus d’opinion, écroués après une marche du mouvement anti-régime du Hirak en mars dernier, avaient aussi entamé une grève de la faim, selon les associatifs.

Benjamin Beraud

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