Face à l’horreur des crimes de guerre du Hamas, il n’y a pas de place pour l’ambiguïté. Il faut condamner. Une condamnation qui ne peut faire l’impasse sur la politique raciste du gouvernement israélien qui assiège et massacre tout un peuple depuis plusieurs décennies. Condamner le Hamas. Et aussi, l’État d’Israël. 

Pierre Jacquemain • 9 octobre 2023

Article paru
dans l’hebdo N° 1779

Condamnés à comprendre
Une femme devant l’ambassade israélienne à Stockholm, en Suède, le 9 octobre 2023.
© Jonathan NACKSTRAND

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Une émotion très sélective

Condamner. Condamner sans réserve. Rien ne justifie le massacre de civils. Et pas davantage les prises d’otage. L’offensive du mouvement islamiste palestinien Hamas, depuis la bande de Gaza, qui a entraîné la mort de nombreux civils – plus de 600 morts selon les autorités israéliennes – s’est retournée presque instantanément contre le peuple palestinien. La réplique du gouvernement d’extrême droite, dirigé par Benyamin Netanyahou – qui a promis de venger « une journée noire » pour les Israéliens –, a déjà provoqué plusieurs centaines de pertes humaines et causé plus de 2 000 blessés. Ce n’est qu’un début. Et après des années de processus d’annexion des territoires palestiniens par Israël, de destruction de leurs maisons, de sabotage de leurs terres agricoles, de coupures d’eau et d’électricité, c’est désormais le siège complet dans la bande de Gaza, qui subit déjà un blocus israélien depuis 2007, et où vivent plus de deux millions d’habitants, condamnés à l’extrême pauvreté.

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Sans doute le sentiment de surpuissance de l’État d’Israël l’aura empêché d’anticiper et de prévenir cette soudaine attaque. La responsabilité, voire la crédibilité, de Netanyahou est largement entachée. C’est peu dire. Peu dire aussi de rappeler que l’horreur vient de loin. Comprendre, expliquer, décrypter ne consiste pas à excuser l’attaque du Hamas. Acte de guerre ou acte de terrorisme ? Les civils morts et leurs familles, nombreuses, n’ont que faire des qualificatifs. Mais condamner sans chercher à comprendre serait irresponsable. Comme l’a rappelé Dominique Moïsi, géopolitologue, sur Franceinfo : « Il faut condamner sans ambiguïté les actes barbares qui ont été commis et il faut prendre du recul pour comprendre d’où vient cette barbarie. Est-ce qu’elle n’est pas le produit d’une humiliation extrême ? »

Aurions-nous des condamnations à géométrie variable ?

Dans l’histoire du conflit israélo-palestinien, il y a bien un agresseur et des agressés. De la même manière qu’entre les Ukrainiens et la Russie de Poutine, il y a des agressés et un agresseur ; qu’entre les Ouïgours et la Chine, il y a des agressés et un agresseur ; qu’entre les Yéménites et l’Arabie saoudite, il y a des agressés et un agresseur ; qu’entre les Arméniens et l’Azerbaïdjan, il y a des agressés et un agresseur. Aurions-nous des condamnations à géométrie variable ? La France, qui par le tweet d’Emmanuel Macron condamne « les attaques terroristes qui frappent Israël », a-t-elle déjà condamné la Chine, l’Azerbaïdjan ou l’Arabie saoudite ? Est-ce trop demander à la France, après avoir condamné le Hamas, de condamner avec autant de force Israël quand, depuis plusieurs décennies, elle massacre un peuple tout entier et lui refuse le droit de vivre dans un État en paix ? Le contexte invite tout à la fois à la fermeté et à la prudence. « Soyons passionnément modérés », comme le plaide Moïsi.

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