Gérard CLABÉ, 1 Décembre 2021 émission le-guide-du-bordeaux-colonial

https://lacledesondes.fr/emission/le-guide-du-bordeaux-colonial

Nous allons parler de la Syrie, en compagnie d’un Franco-Syrien, qui ne vous est pas tout à fait inconnu si vous écoutez cette émission, Abdulrahman Khallouf, auteur et metteur en scène de théâtre, poète également. Rendez-vous mercredi 01/12 à 13H.

Photo de l'article: La Syrie vue par Abdulrahman Khallouf

Nous allons retracer votre parcours personnel, d’étudiant en Arts dramatiques à Damas, votre exil en France, vos créations, déjà nombreuses, appréciées et reconnues, sur une toile de fond prégnante, envahissante, celle de l’histoire de la Syrie ces 50 dernières années et au-delà…

Sykes-Picot, caricature d’accord colonial

Après quatre siècles de domination ottomane, la Syrie, dans sa version moderne, est un pays, créé de toutes pièces par les deux puissances impériales coloniales, le Royaume uni et la France, en pleine Première guerre mondiale, à l’occasion d’accords secrets entre les diplomates Sir Mark Sykes et François Georges-Picot, les accords Sykes Picot (1916), caricatures d’accords coloniaux, où les territoires qu’on se partage le sont de façon complètement artificielle, à la convenance des puissances impériales et où les populations qui y vivent sont traités comme quantité négligeable, déshumanisées, « décivilisées »… Accords confirmés au lendemain de la guerre, au mépris du principe « du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » qui aurait pu et dû s’imposer davantage durant la Conférence pour la Paix à Paris entre les vainqueurs après cette terrible hécatombe.

La France hérite de la Syrie et du Liban sous la forme d’un Mandat confié par la SDN (Société des Nations), ancêtre de l’ONU et s’engage, ce sont les termes du « contrat », à préparer l’accès à l’indépendance, ce que la puissance mandataire française a ostensiblement ignoré.

La Syrie obtient son indépendance en avril 1946, c’est d’ailleurs un des premiers pays décolonisés de l’après 2ème guerre mondiale, mais sans doute car sa nature d’Etat colonial, créé artificiellement, rend les choses très complexes, voire ingouvernables, la Syrie connaît 25 ans d’instabilité politique, où les civils ont rarement le pouvoir, on assiste à une succession de coups d’Etat militaires, jusqu’à ce que un d’entre eux, un de plus, porte au pouvoir, en 1970, un El Assad, Hafez el Assad, le père de Bachar.

La Syrie, celle où vous naissez, en 1977, devient alors une dictature, avec un chef qui a tous les pouvoirs, un parti unique, le parti Baas, jamais d’élections (juste des référendums pour s’autolégitimer) et un appareil de sécurité et une armée contrôlant la population et exécutant les basses œuvres comme le massacre de la ville de Hama en 1982, nous y reviendrons…

En 2000, le fils, Bachar, prend la succession du père décédé, le régime s’adoucit un tout petit peu, mais ça ne dure pas, à peine 6 mois, avant de redevenir une dictature avec les mêmes méthodes.

En 2011, ce sont les « Printemps arabes » (expression qu’il serait bon d’utiliser avec précaution car là aussi nous sommes en présence d’une formule, pratique mais réductrice, vision occidentale, qui fait référence aux « Printemps des peuples » de 1848 en Europe, ou au Printemps de Prague en 1968… les observateurs européens qui popularisent la formule, prennent peut-être un peu leurs désirs pour des réalités…

En Syrie en tous les cas, les manifestations pacifiques débutées en mars 2011, pour exiger plus de libertés et de démocratie, sont tout de suite réprimées dans le sang par le régime et la guerre civile s’enclenche, « guerre civile », n’étant pas le terme le plus adapté puisque le conflit s’internationalise avec les interventions des Etats-Unis, de la Russie, de la Turquie, de l’Iran, du Royaume Uni, d’Israël, de la France.. et l’irruption de la question confessionnelle avec l’Etat islmamique et l’instauration d’un califat.

Aujourd’hui, votre pays est complètement meurtri : au moins 500 000 morts, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, la moitié de la population déplacée, 6 millions d’exilés (1/4 de la population !), un pays ruiné, éclaté…

Photo de Une : Abdulrahman Khallouf (Copie d’écran Youtube)

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