Une manifestation en soutien à le journaliste Erol Önderoğlu, le militant des droits humains Şebnem Korur Fincancı, et l’écrivain Ahmet Nesin, devant d’un tribunal, Istanbul, Turquie, le 8 novembre 2016, YASIN AKGUL/AFP via Getty Images

A la veille de l’ouverture du procès du représentant de RSF en Turquie, Erol Önderoğlu, et ses co-accusés, 17 organisations de défense de la liberté de la presse et des droits humains publient une déclaration commune pour soutenir ce journaliste et défenseur du droit d’informer en Turquie.

A la veille de l’ouverture du procès du représentant de RSF en Turquie, Erol Önderoğlu, 17 organisations de défense de la liberté de la presse et des droits humains publient une déclaration commune pour soutenir ce journaliste et défenseur du droit d’informer en Turquie, qui risque 14 ans de prison.  

Les organisations de défense de la liberté d’expression, des droits humains et de journalistes soussignées dénoncent le harcèlement judiciaire que subissent les journalistes en Turquie et en particulier Erol Önderoğlu, représentant de l’organisation de défense de la liberté de la presse Reporters sans frontières (RSF) dans le pays. Erol Önderoğlu risque une longue peine de prison pour son travail promouvant le pluralisme médiatique.

Appelé à comparaître pour avoir participé à la campagne « Rédacteurs en chef en alerte » organisée en solidarité avec le quotidien Özgür Gündem, fermé en 2016, Erol Önderoğlu et ses deux co-accusés, le physicien et militant des droits humains Şebnem Korur Fincancı, et l’écrivain et journaliste Ahmet Nesin, ont, initialement, été acquittés au terme d’une procédure judiciaire qui a duré trois ans. Mais le 3 novembre 2020, la troisième chambre pénale de la Cour d’appel d’Istanbul a annulé la décision d’acquittement prononcée le 17 juillet 2019.

C’est ainsi que M. Önderoğlu et ses co-accusés seront à nouveau jugés pour « propagande pour une organisation terroriste », « incitation publique à commettre des crimes » et « apologie des crimes et des criminels » à partir du 3 février prochain. Ces charges fallacieuses leur sont imputées pour l’unique raison d’avoir hébergé la rédaction du quotidien susnommé, victime de la répression des médias qui a suivi la tentative de coup d’Etat de 2016. Ensemble, les trois co-accusés risquent jusqu’à 14 ans et demi de prison en vertu de la loi anti-terreur n° 3713 et du Code pénal turc.

Ce nouveau procès infligé à cet infatigable défenseur de la libre expression est une tragique illustration de la chasse aux sorcières lancée par le gouvernement du président Erdogan contre les médias critiques turcs. La Turquie est actuellement la plus grande prison européenne pour les journalistes professionnels, et les quelques médias indépendants qui subsistent subissent un harcèlement et une marginalisation continus, tandis que les journalistes détenus et les rédactions contraintes de fermer sont privés de tout recours légal.

Nous dénonçons la détention et les poursuites dont les journalistes sont actuellement victimes en Turquie, et qui constituent une tentative autocratique de réduire au silence toutes les voix dissonantes et d’empêcher les journalistes indépendants de mener leur activité.

Nous assurons Erol Önderoğlu et ses deux co-accusés, Şebnem Korur Fincancı et Ahmet Nesin, poursuivis en Turquie depuis quatre ans, de notre soutien et de notre solidarité. Nous appelons le gouvernement turc à abandonner toutes les charges qui pèsent sur eux et de mettre un terme à toute forme de répression envers les journalistes, les écrivains et les universitaires.

« L’acharnement judiciaire que subit Erol s’inscrit dans l’importante répression de la liberté d’expression qui sévit en Turquie. Il est emblématique des abus de droit dont sont victimes, sous nos yeux, des centaines de journalistes et d’acteurs de la société civile dans le pays. Nous lui assurons notre soutien et notre solidarité, et demandons que les charges retenues contre lui et ses co-accusés, Şebnem Korur Fincancı et Ahmet Nesin, soient immédiatement abandonnées », déclare la directrice du programme Europe et Asie centrale d’Article 19, Sarah Clarke.

« Le fait qu’Erol continue d’être persécuté pour un acte de solidarité envers ses confrères révèle le pitoyable niveau de l’Etat de droit en Turquie. Nous l’assurons de notre soutien et exigeons que cesse cet harcèlement judiciaire acharné », indique le responsable du plaidoyer du Centre européen pour la liberté de la presse et des médias (European Centre for Press and Media Freedom, ECPMF), Laurens Hueting.

« Erol a accompli un immense travail de défense de la liberté de la presse en Turquie, et celui-ci doit être apprécié à sa juste valeur et non puni. Les autorités turques devraient abandonner les charges qui pèsent sur lui, lui permettre de travailler en toute sécurité dans le pays et prendre des mesures pour améliorer l’état désastreux de la liberté de la presse en Turquie », indique la coordinatrice des programmes Europe et Asie centrale du Comité pour la protection des journalistes (CPJ), Said Gulnoza.

« Erol est toujours parvenu à collaborer sur le terrain avec les syndicats et les organisations affiliés à la Fédération européenne des journalistes (FEJ). Notre conviction est que l’acharnement judiciaire qu’il subit constitue en réalité une action d’intimidation envers tous les journalistes du pays. Nous le soutenons », affirme le secrétaire général de la FEJ, Ricardo Guttierez.

« Bien que cette affaire concerne Erol, ses retombées affecteront chaque journaliste indépendant et chaque citoyen en Turquie. Si les autorités parviennent à réduire les journalistes comme Erol au silence, les citoyens se verront privés de leur droit à l’information et la démocratie en pâtira. Abandonnez toutes les charges maintenant ! », demande le secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes (FIJ), Anthony Bellanger.

« La cruauté d’avoir acquitté puis poursuivi à nouveau Erol Önderoğlu pour les mêmes charges fallacieuses est incommensurable. Elle illustre une justice turque qui non seulement est dans l’erreur, mais se montre vindicative. La pratique qui consiste à réduire au silence des journalistes engagés comme Erol Önderoğlu doit cesser. Soyez assurés que le monde entier est désormais au fait du harcèlement et de la persécution, et que les autorités turques doivent en tenir compte et mettre un terme à ces attaques », déclare la directrice de l’IFEX (International Freedom of Expression Exchange), Annie Game.

« Les poursuites sans scrupules des autorités turques contre Erol, Şebnem et  Ahmet révèlent jusqu’où elles sont prêtes à aller pour réduire les voix dissidentes au silence. Nous exhortons les autorités à respecter, dans leur intégralité et sans conditions, les droits fondamentaux de ces trois défenseurs des droits humains – ni plus ni moins », déclare la responsable de recherche en politique et du plaidoyer d’Index on Censorship, Jessica Ní Mhainín.

« L’acharnement judiciaire permanent contre Erol Önderoğlu et ses co-accusés souligne, une fois encore, l’instrumentalisation de la justice turque par le gouvernement pour servir la répression de la liberté d’expression et de la liberté de la presse. Cette affaire aussi scandaleuse qu’éhontée ne vise qu’à réduire au silence ceux qui s’expriment en faveur de la défense des droits fondamentaux en Turquie. L’IPI et ses membres assurent Erol de leur soutien et de leur solidarité », affirme le directeur adjoint de l’International Press Institute (IPI), Scott Griffen.

« Pendant des années, notre confrère Erol Önderoğlu est monté au front pour défendre la liberté d’expression en Turquie. Il a mené cette lutte avec intégrité, impartialité et objectivité. Le fait qu’il risque l’emprisonnement pour son engagement dans la liberté de la presse est un déplorable déni des droits mêmes qu’il a cherché à protéger », dénonce la coordinatrice du programme Europe régionale de PEN International, Sarah Whyatt.

« Erol Önderoğlu devrait représenter l’honneur de la Turquie. Au lieu de cela, il est poursuivi, voire harcelé, pour des raisons arbitraires. Aucun pays ne peut prétendre être une démocratie lorsque son gouvernement et sa justice combattent des défenseurs des droits humains de cette manière », déclare le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire.

ONG signataires :

  • IFEX
  • IFEX-ALC
  • Centre européen pour la liberté de la presse et des médias (European Centre for Press and Media Freedom, ECPMF)
  • Fédération internationale pour les droits humains (FIDH)
  • Forum mondial pour l’expansion des médias (Global Forum for Media Development, GFMD)
  • International Media Support (IMS)

Images liées:

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.