Les prévenus au premier rang, avant l'audience.
Les prévenus au premier rang, avant l’audience. © Radio France – Jeanne Maisiat

Drôle de parfum au palais de justice de bordeaux en ce deuxième jour du printemps. Si dehors, ça sent le fumigène et la lacrymo des joyeusetés post manif contre la réforme des retraites, à l’intérieur, c’est plutôt le fumet du vert de gris rancis. Sur le banc des accusés 8 garçons, presque des gamins, un peu plus de 20 ans pour la plus part, un seul frise la quarantaine. Ils comparaissent pour des faits de violences sexistes et racistes commis dans le quartier Saint-Michel dans la nuit du 24 au 25 juin dernier.

Une “tournée des bars entre amis” selon les accusés, membres ou sympathisants du groupuscule d’extrême droite Bordeaux Nationaliste dissous depuis par le ministre de l’Intérieur; mais une tournées amicales avec gazeuzes dans les poches, masques sur le visage et même batte de base ball pour l’un. Après avoir écumé quelques bars des quais, vers 2 heures du matin, ces garçons “sympathiques” traversent la place Saint-Michel, en criant leurs slogans: Bordeaux nationaliste, mais ils sont où les antifas? sale meuf sale pute à une dame etc… poussant des cris de singes, agressant et gazant ceux qui osent s’interposer. De nombreuses photos et surtout vidéos présentées pendant l’audience sont venues assez clairement documenter la folle soirée et l’identité de ses acteurs en particulier une photo provenant du téléphone d’un des prévenus. On y voit les “amis” posant avec batte de base ball, gestes nazis devant le bar au nom du “Singe Vert”, repaire de gauchistes selon eux. Photo qui a circulé sur les réseaux sociaux comme les vidéos filmées par les riverains, permettant l’identification des membres du groupuscule.

Conférence de presse des parties civiles juste avant l’audience Ph JF M

Trois personnes, victimes de coups ou d’injures ont déposées plainte et se retrouvent sur les bancs de la partie civile avec 3 associations, La Ligue des Droits de l’Homme, La Licra et SOS Racisme. Parmi les avocats des parties civiles, aux côtés de Pierre-Antoine Cazaux, par ailleurs pdt de la LDH Bordeaux, le ténor du barreau parisien Arié Alimi. Quant aux prévenus, ils étaient principalement défendus par un avocat toulousain Pierre Marie Bonneau.

Huit jeunes gens donc, d’une grande banalité, peu diplômés, dans des fonctions ou d’ouvriers, casiers vierges, r.a.s sur le plan psychiatrique, globalement têtes très bien dégagées derrière les oreilles mais assez bas du front, allaités souvent chez Zemmour et Bolloré. Certains dans des discours racisto-nationalistes bien enkystés, défendre la culture européenne, d’autres fragiles et entraînés, aujourd’hui dans un regret sans doute sincère.

Avec tous une capacité de déni concernant les faits, se faisant passer pour des victimes, nous avons été agressé par des dealers et nous nous sommes défendus assurent-ils en substance et avec aplomb. Noyant le poisson nazillard du bras tendu dans une nébuleuse symbolique romaine ou celte, c’est selon… quant au geste de de Kühnen , Kühnengruss, le salut à la Künen (1) destiné à remplacer le salut hitlérien, bras et main droite tendu, désormais interdit et passible de poursuites, les prévenus en ignorent ou feignent d’en ignorer la signification: on fait ça dans tous les stades, c’est juste un signe de ralliement etc…

L’audience se poursuivra demain vendredi avec les plaidoiries des avocats.

Jean-François Meekel

1: Kühnen Gruss , allusion au néonazi allemand Michael Kühnen mort en 1991, consiste à imiter avec trois doigts de la main droite le symbole W, pour Widerstand, « résistance » au régime démocratique.

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