“Jamais un président du CRIF n’avait affiché avec autant d’arrogance sa prétention à donner des leçons à tout un chacun : à la République, au gouvernement, aux partis politiques, aux intellectuels et aux chercheurs.”

Monsieur le Président,

Le combat contre l’antisémitisme nous anime depuis des décennies, comme citoyens, comme intellectuels et comme juifs.

Nous divergeons toutefois de longue date avec la conception qu’en défend la direction du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), dont vous êtes devenu récemment le président.

Si nous avons décidé de vous écrire, c’est que votre discours au 37e dîner du CRIF nous semble franchir une étape nouvelle et dangereuse dans le positionnement de votre organisation.

Jamais un président du CRIF n’avait affiché avec autant d’arrogance sa prétention à donner des leçons à tout un chacun : à la République, au gouvernement, aux partis politiques, aux intellectuels et aux chercheurs – la manière dont vous attaquez nommément Pascal Boniface est inacceptable.

Nous n’acceptons pas non plus votre présentation, malgré quelque précaution, de la critique de la politique d’Israël et de la défense du droit international.

En outre, nous ne pouvons comprendre votre obstination à présenter comme « antisémites » les idées antisionistes, dont vous savez fort bien qu’elles ont toujours été présentes – et même longtemps majoritaires – parmi les juifs, en France comme ailleurs.

Nous tenons à vous mettre en garde contre le risque que comporte votre démarche, par son fond et son ton. Vous alimentez, ce faisant, deux clichés antisémites que nous ne cessons de combattre :

• celui selon lequel les juifs formeraient un lobby cherchant à imposer sa volonté à notre pays;

• celui selon lequel ils manifesteraient en réalité une double allégeance, à la France et à l’État d’Israël.

En profilant le CRIF comme une ambassade bis de l’État d’Israël, défendant inconditionnellement la politique de celui-ci, vous ne trahissez pas seulement sa fonction : vous confortez l’amalgame mortifère entre un gouvernement israélien qualifié de « fasciste » par un ancien Premier ministre et les juifs de France, que vous contribuez à transformer en cibles.

Il est temps de revenir à l’inspiration de notre ami Théo Klein: contre la concurrence des mémoires et des victimes, pour une lutte commune pour la paix au Proche-Orient, contre l’antisémitisme et le racisme.

Avec l’assurance de notre détermination à faire entendre une autre voix juive,

Bien à vous,

Tauba Alman, militante associative

Hervé Bismuth, maître de conférences à l’Université de Bourgogne

Rony Brauman, ancien président de Médecins sans frontières

Henri Blotnik, documentaliste

Norland Cohen, médecin-anesthésiste

Sylvain Cypel, journaliste

Sonia Dayan-Herzbrun, sociologue, professeure émérite à l’université Paris Cité

Jacques Dimet, éditeur

Bernard Frédérick, rédacteur en chef de La Presse Nouvelle Magazine

Jean-Guy Greilsamer, militant juif antisioniste

Pierre Khalfa, économiste Fondation Copernic

Sacha Kleinberg, militant associatif

Daniel Kupferstein, réalisateur

Robert Kissous, économiste, responsable associatif

Jean-François Marx

Dominique Natanson, porte-parole de l’Union juive française pour la paix

Annie Ohayon, productrice

André Rosevègue, militant anticolonialiste et antiraciste, Gironde

Dominique Salomon, Association catalane de Juifs et Palestiniens

Élisabeth Salomon, retraitée de la fonction publique

Carol Shyman, programmatrice de films

Mchèle Sibony, militante anticolonialiste

Pierre Stambul, Union juive française pour la paix

Dominique Vidal, journaliste et historien

Evelyne Zarka-Ferrand, professeure des écoles retraitée, ancienne adjointe chargée de la mémoire à la mairie du IVe arrondissement de Paris

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