Confidences pour confinement: si J1 est  le mardi 17 mars à midi, aujourd’hui nous sommes J8. J’ai installé notre dunette au plus haut (accès sur le toit interdit aux septuagénaires… chute encore plus craignos que le covid19). La boussole indique le plein sud entre les deux flèches de Pey Berland. Cap vers nulle part. Nous sommes encalminés. La météo est bonne. Le baromètre stable. La vue: un180° dégagé qui va du clocher de la Place de la Bourse, au bord du fleuve, aux ruines du  Colisée au bout de la rue.

Stratégiquement, j’ai pris de la hauteur : je surplombe désormais mes voisins. La blonde sur sa terrasse tropézienne avec sa chienne de chasse pas dressée du tout, le couple bohème qui ne se passe rien, s’aime et s’engueule à tous vents (faut dire qu’ils font aussi preuve d’abnégation car nous ne les épargnons pas non plus), la dame toute seule qui aime Bourvil et ma sifflette depuis déjà un septennat. Ils ne me voient pas, je suis au ciel et ils ne lèvent pas les yeux. Et au ciel, dégagé aujourd’hui, j’ai rendez-vous avec de vieilles connaissances, le plus vieux couple du quartier : les Lapie.

Ils s’habillent unisexe les Lapie, la  femelle et le mâle ont le même plumage. Ces deux-là sont inséparables. Des fusionnels enragés. Leur journée commence sur le grand arbre à trois cents mètres (à vol d’oiseau évidemment). Leur arbre, les pies ne le partagent pas avec les corneilles. Surtout les corneilles.  Depuis sept ans, nous nous saluons au réveil, nous n’avons pas grand-chose à nous dire mais les voir dans le paysage m’apaise. En bon couple fusionnel les Lapie se chamaillent, se mêlent de tout et jacassent. 

J8 ne change rien à leurs habitudes. Savent-ils que dans 27 jours  -soit J35 le 20 avril 2020 selon un laborieux calcul mental au faîte de la dunette –  savent-ils que les martinets seront là, fidèles au rendez-vous. Et ils resteront jusqu’à fin août.

Les martinets ont un de leurs nids sous la fenêtre de notre cuisine. Leurs trilles stridents enchantent les airs. Leurs fientes tapissent le seuil de l’immeuble. Je les aime ces ambassadeurs des beaux jours, je les attends.

Patientons. 

Et puis J35… cela fait encore loin. Un insondable vertige me prend et si J35 était l’exacte réplique de J8. Pourquoi pas J60 tant que j’y suis ! Horreur, malheur et patate au beurre ! Je suis enfermé dans un remake d’ « Un jour sans fin ».

En attendant, musique. T de la rue de la Roquette(75020)  m’a fait un beau cadeau. Allez les oiseaux, c’est le printemps : enivrons-nous et chantons saouls la pie !

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