Macky Sall, le président sénégalais, soutient la décision prise par le G20 d’accorder aux pays pauvres un moratoire d’un an. Mais cela reste loin des véritables attentes. Ce report représente, en effet, 20 milliards de dollars alors que le total de la dette africaine est de 365 milliards. Selon Dakaractu le président sénégalais est convaincu que l’évolution de l’épidémie sur le continent africain, économiquement vulnérable, peut être une menace potentielle pour le monde. Par conséquent, il encourage à renouer avec le dialogue, l’entraide, la solidarité et l’appui constant pour faire face à ce virus. Ainsi, « le monde ne guérira entièrement que lorsque le virus disparaîtra de tous les pays ». Pour autant, Macky Sall, qui a lancé un plan de résilience économique et sociale le 3 avril dernier, souligne l’importance de “se départir du préjugé considérant l’Afrique comme dépendante de l’aide extérieure”. A titre d’exemple, les envois de fonds par la diaspora au Sénégal, représentent plus de trois fois le montant de l’aide internationale.
Felwine Sarr, économiste sénégalais, affirme quant à lui que l’Afrique n’est pas surendettée d’un point de vue structurel. Le continent à un ratio dette sur PIB de 60%, ce qui est soutenable. Dans les 15 pays les plus endettés au monde, on trouve des grandes puissances économiques comme les Etats-Unis ou la France. Selon lui, en volume, la dette africaine représente environ 500 milliards de dollars, soit 0,2 % de la dette globale. « Le problème, ajoute cet intellectuel parmi les plus en vue du continent, c’est que “la dette africaine” est devenue un totem. Une notion que l’on n’interroge pas et qui va de soi. » Il met donc son expertise au service du plan de résilience économique et sociale mis en place par le gouvernement sénégalais. Lors d’une interview, pour TV5 Monde Afrique, il analyse la synergie efficace et pluridisciplinaire qui s’est développée sur le territoire sénégalais. En effet, dès le début de la crise, les universitaires ont créé des groupes de travail par champs de compétence. Le groupe « économie », qui travaille avec le ministre de l’Economie, veut pouvoir anticiper l’impact de la crise économique au niveau des transports, du tourisme, du commerce, de la culture et du secteur informel, très exposés en ce moment. « Quand le monde nous prédisait le pire, nous étions au travail afin d’apporter une réponse adaptée aux spécificités de nos sociétés. »
Comme pour d’autre pays du continent africain, la Chine est un important partenaire commercial sans pour autant que l’économie sénégalaise en soit dépendante. Le choix de ne pas avoir délocalisé en masse est un avantage durant cette crise mondiale. A présent, les questions soulevées par les économistes sont d’ordre de la réorientation, de la restructuration des économies, de l’indépendance des productions de matières premières ou encore de rendre locales les industries qui peuvent permettre d’atteindre une auto-suffisance alimentaire. Felwine Sarr soutient qu’après la crise, un travail devra être fait sur la stratégie du secteur de la santé afin de le rendre indépendant, car le commerce international étant actuellement fortement freiné, chaque pays africain doit gérer au mieux ses stocks. Felwine Sarr termine son interview en mettant l’accent sur cette crise qui résulte de nos modes de vie, de la dévastation de la biodiversité et de la réduction de l’habitat naturel d’espèces non humaines. D’après lui, nul ne sera épargné des effets d’une crise climatique d’ampleur. En outre, la pandémie montre la nécessité radicale de changer notre rapport à l’écologie, la surconsommation et les excès économiques et industriels.
On peut en constater les premiers grands effets au Nigéria, première économie et principal producteur d’or noir en Afrique, où le ministre des Finances a annoncé que le gouvernement allait revoir son budget à la baisse dans un contexte de chute brutale des cours mondiaux du pétrole ; une des nombreuses conséquences du COVID-19. Pour l’instant, la plupart des analystes s’accordent à dire qu’il est tôt pour savoir à quel point la chute des cours du brut va impacter l’économie du pays le plus peuplé d’Afrique avec 200 millions d’habitants.
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