Dans son premier roman, Ta-Nehisi Coates joue avec le fantastique et s’attaque à l’histoire américaine.

Ta-Nehisi Coates lors d'une intervention à Washington, le 19 juin 2019, au sujet de la Constitution, des droits et des libertés civiques.
Ta-Nehisi Coates lors d’une intervention à Washington, le 19 juin 2019, au sujet de la Constitution, des droits et des libertés civiques.• Crédits : AFP

Outre-Atlantique, c’est une voix de sa génération. Une voix de la communauté afro-américaine. Ta-Nehisi Coates, célèbre pour ses essais et ses articles, est passé au roman. The Water Dancer, sorti aux États-Unis en 2019, est publié en français sous le titre La Danse de l’eau.

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À travers ce récit qui se déroule dans le Sud américain au XIXe siècle et met en scène un jeune esclave, Ta-Nehisi Coates s’attèle à écrire une autre histoire, d’autres représentations de l’époque de la période de l’esclavage. Il confère aussi à son roman une dimension fantastique. Rien d’étonnant : son propos radical et son action publique – jusque devant des commissions du Congrès – n’empêchent pas l’essayiste de se frotter à la culture populaire, par exemple à travers le récit de Black Panther.

De l’essai à la fiction

Pourquoi avoir décidé d’écrire un roman après plusieurs essais, remarqués en France et aux Etats-Unis ?

Le roman, finalement, c’est quelque chose que j’ai commencé avant d’avoir écrit la plupart de ces essais. J’ai commencé La Danse de l’eau en 2009, donc avant que Colère noire et même Le Procès de l’Amérique soient publiés. Mais il m’a simplement fallu dix ans pour écrire ce roman.

Qu’est-ce qui a été le plus compliqué ?

On était sur une échelle très différente. En 2009, cela faisait quinze ans que je travaillais comme journaliste, mais je n’avais pas vraiment d’expérience comme romancier. Donc finalement, avec La Danse de l’eau, j’ai du apprendre à écrire de la fiction.

Métissage et esclavage

Vous avez décidé de vous attacher à l’histoire d’Hiram, un jeune esclave, fils du propriétaire blanc de la plantation de tabac. Il a un don : il est doté d’une mémoire prodigieuse. Pourquoi avoir choisi un personnage métis ?

Car en Amérique, l’ensemble de la population afro-américaine dérive de cet héritage. Nous avons tous ce métissage en nous, celui de l’esclavage. Aux Etats-Unis, l’histoire des races et celle de l’esclavage sont une seule et même histoire. Pour moi, c’était donc naturel.

Le don de “conduction”

Ce personnage incarne la mémoire de l’esclavage, et il est doté d’un don particulier : celui de la “conduction”. En quoi consiste ce pouvoir mystérieux ?

C’est la capacité de se déplacer d’un lieu à un autre. Mais pour pouvoir utiliser ce pouvoir, se déplacer sur de longues distances, il est nécessaire de puiser dans les souvenirs les plus difficiles, les plus douloureux de notre passé. Finalement, cela représente cette idée simple : pour avancer dans notre vie, il nous faut aussi nous confronter à notre passé. C’est un peu un cliché, quelque part (rires).

Une prise de conscience

Vous aussi, comme Hiram, vous avez petit-à-petit pris conscience de la manière dont la question raciale se posait aux Etats-Unis ? Non pas comme elle se posait en Virginie au XIXe siècle, mais comment la mémoire de l’esclavage et la manière dont celle-ci pouvait structurer l’espace américain.

Ici, c’est vraiment une histoire de réalisation : j’ai commencé à comprendre le monde, et donc finalement, je me retrouve aussi dans cette histoire.

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