Au 27e jour du conflit, les dernières frappes de l’armée israélienne, qui a bombardé à deux reprises depuis mardi le camp de réfugiés de Jabaliya, ont suscité des réactions partout dans le monde. Le ministère français des affaires étrangères rappelle l’« obligation » de respecter le droit international.

La rédaction de Mediapart

2 novembre 2023 à 09h35

AuAu 27jour du conflit au Proche-Orient, jeudi 2 novembre, les réactions se multiplient après les frappes aériennes, mercredi, sur le plus grand camp de réfugié·es de Gaza, Jabaliya, censées viser un dirigeant du Hamas, présenté par le gouvernement israélien comme l’un des cerveaux de l’attaque terroriste du 7 octobre.

Selon Reuters, qui s’appuie sur les chiffres communiqués par le Hamas, 195 Palestinien·nes auraient été tué·es par l’offensive israélienne qui a eu lieu dans le camp ces derniers jours, 120 personnes sont par ailleurs toujours portées disparues, et 777 ont été blessées.

Selon le service de presse du Hamas, de nouvelles « frappes israéliennes massives » auraient eu lieu, dans la nuit de mercredi à jeudi, dans le quartier de Tal al-Hawa, à l’ouest de Gaza. En parallèle, l’armée israélienne continue son offensive terrestre dans l’enclave palestinienne.

La France va envoyer un deuxième navire militaire à Gaza

La France a annoncé jeudi soir, par la voix du ministre des armées, l’envoi d’un deuxième navire militaire au large de Gaza. Le porte-hélicoptères Dixmude « est en train d’être équipé pour être transformé en bateau hospitalier », a précisé Sébastien Lecornu sur France Info, en début de soirée.

Prévu mi-novembre, l’appareillage du second des trois porte-hélicoptères de la flotte nationale (le Tonnerre est parti le 25 octobre de Toulon) permettra de mettre à disposition de la population gazaouie « un certain nombre de lits hospitaliers » supplémentaires, selon le ministre. « Les populations civiles de Gaza doivent être protégées, c’est le droit international et c’est aussi le devoir moral de la France que de jouer ce rôle dans la région », a indiqué Sébastien Lecornu, soulignant également qu’Israël « doit pouvoir se défendre ».

Nétanyahou se félicite de ses « succès très impressionnants », les experts de l’ONU redoutent un « génocide »

Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, s’est affiché sur Twitter, ce jeudi, entouré de dizaine de soldats cagoulés et armés de fusils d’assaut, pour se féliciter des « succès très impressionnants » de Tsahal. « Rien ne nous arrêtera. Nous avancerons et gagnerons, et nous le ferons avec l’aide de Dieu et avec l’aide de nos guerriers héroïques », a-t-il tweeté, promettant la « victoire » à la « la nation entière d’Israël » et se félicitant que l’armée israélienne entoure la ville de Gaza.

Au même moment, les experts de l’ONU ont fait part de leur inquiétude et réclamé un cessez-le-feu immédiat. « Nous restons convaincus que le peuple palestinien court un grave risque de génocide », ont-ils déclaré. « Il est temps d’agir. Les alliés d’Israël portent également une responsabilité et doivent agir maintenant pour empêcher son action désastreuse », ont-ils ajouté.

Le Bahreïn rompt ses relations économiques avec Israël

Les pays arabes entrés dans un processus de normalisation avec l’État d’Israël semblent faire marche arrière. Quelques jours après que le ministre des affaires étrangères de Jordanie a rappelé son ambassadeur en Israël, ce jeudi, le Parlement du Bahreïn, l’un des premiers signataires des accords d’Abraham, a annoncé que le pays rompait ses liens économiques avec l’État hébreu, arguant de l’« irrespect total de la loi humanitaire internationale » de ce dernier, comme de son soutien à la cause palestinienne.

En décembre dernier, les deux pays affichaient pourtant leur bonne entente, lors d’un déplacement au Bahreïn du président israélien, Isaac Herzog. Le ministère des affaires étrangères israélien a expliqué n’être pas au courant de la décision du Parlement bahreïnien et estime que le pays du Golfe ne fait que répondre aux aspirations de ses citoyens et citoyennes.

Des évacuations insuffisantes

Alors que les bombardements israéliens pleuvent sur la bande de Gaza et que la guerre meurtrière entre le Hamas et Tsahal continue au sol, l’Agence France-Presse (AFP) rapporte que « plusieurs centaines de blessés palestiniens et d’étrangers sont en passe d’être évacués en Égypte » via Rafah.

Une goutte d’eau, par comparaison avec les 2,2 millions de personnes restant sur le territoire. Plus de 20 000 blessé·es se trouvent toujours dans l’enclave, a aussi affirmé Médecins sans frontières.

« Si les expatriés vont pouvoir s’échapper parce que l’enfer à Gaza se poursuit, alors il faudra questionner la possibilité pour les Gazaouis qui le souhaitent de pouvoir fuir cet enfer avec des garanties de pouvoir revenir ensuite », a indiqué, aujourd’hui, sur France 24, Jean-François Corty, vice-président de Médecins du monde. Il a également averti que « dans les jours qui viennent, ce sera l’ensemble des hôpitaux [à Gaza – ndlr] qui ne sera plus fonctionnel ».

Le nombre de morts et de blessés palestiniens revu à la hausse

Le ministre de la santé gazaoui a déclaré qu’au moins 9 061 personnes, dont plus de 3 760 enfants et 2 326 femmes, ont été tuées lors des attaques contre Gaza depuis le 7 octobre. Toujours selon le Hamas, 32 000 autres ont été blessées.

Si ce bilan n’a pas été confirmé par des sources indépendantes, reste que la pression s’accentue sur Israël. Pour la première fois mercredi, le président américain Joe Biden a appelé l’État hébreu à une « pause » humanitaire dans la guerre. L’Arabie saoudite a quant à elle lancé un appel à dons pour soutenir les Palestiniens et Palestiniennes de Gaza.

Deux bergers libanais tués par des tirs israéliens

Jeudi, les corps de deux bergers d’une vingtaine d’années qui étaient portés disparus depuis mercredi ont été retrouvés au Sud-Liban. Depuis des années, des tensions ont lieu sur la « ligne bleue » définissant la frontière entre le pays du cèdre et Israël, et cela fait plusieurs années que des enlèvements de bergers ont lieu sur cette zone. Selon L’Orient-Le Jour, l’armée israélienne avait interrompu ses tirs pour permettre à l’armée libanaise et aux forces des Nations unies au Liban de rechercher les bergers.

Le Quai d’Orsay « profondément inquiet »

Mercredi 1er novembre au soir, le ministère des affaires étrangères a indiqué, dans un bref communiqué, que la France était « profondément inquiète » face au « très lourd bilan pour les populations civiles palestiniennes » des frappes israéliennes sur Jabaliya. La ministre, Catherine Colonna, a tenu à rappeler que « la protection des populations civiles » est une « obligation » du droit international.

Illustration 1
Dans le camp de Jabaliya, après le deuxième bombardement de l’armée israélienne à Gaza le 1er novembre 2023. © Photo Ali Jadallah / Anadolu via AFP

Sitôt publié, le communiqué du Quai d’Orsay a fait l’objet de vives critiques d’une partie de la gauche française, plusieurs députés de La France insoumise s’étonnant de ne pas trouver d’appel au cessez-le-feu dans le texte, ou jugeant les propos de la ministre bien timides face aux événements en cours dans la bande de Gaza.

L’ONU « craint » un possible « crime de guerre »

Les bombardements israéliens sur le camp de réfugié·es de Jabaliya, dans la bande de Gaza, où vivent plus de 100 000 personnes, « pourraient être des crimes de guerre », a déclaré, mercredi sur Twitter, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU, qui a avancé le « nombre élevé de victimes » et « l’ampleur des destructions » pour justifier de sa qualification. « Nous craignons sérieusement qu’il s’agisse d’attaques disproportionnées qui pourraient être des crimes de guerre », a ajouté le Haut-Commissariat sur le réseau social.

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, s’est, lui, dit « atterré » par les frappes sur le camp de Jabaliya, où vivent 116 000 réfugié·es dans le nord de la bande de Gaza, ciblé par des bombardements mardi et mercredi.

La rédaction de Mediapart

Images liées:

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.