• Awa Cheikh Faye
  • Journaliste – BBC Afrique

Sur internet, difficile de passer ces derniers jours à côté de la vidéo du discours de Ragnimwendé Eldaa Koama, donné lors du dernier sommet Afrique-France à Montpellier.

La jeune burkinabè qui dès l’entame de son propos prévient que son ”interpellation sera celle de la vérité, de la sincérité et de la franchise”, est la nouvelle sensation des réseaux sociaux en Afrique francophone.

Elle commence en dénonçant ”un vocabulaire dévalorisant” des autorités françaises dans leurs échanges avec l’Afrique, avant de poursuivre en disant “si la relation entre les pays d’Afrique et la France était une marmite, sachez qu’elle est très sale, cette marmite…”

”…Si vous refusez de la laver, si vous voulez quand même préparer là-dedans, je ne mangerais pas, nous ne mangerons pas, l’Afrique ne mangera plus!

Ces mots de Ragnimwendé Eldaa Koama au président français et repris en boucle par les médias l’ont propulsé sous le feu des projecteurs.

C’est que la jeune burkinabè n’en est pas à son coup d’essai. Elle est une habituée des compétitions d’art oratoire, une de ses passions. ”J’ai toujours vu les conversations comme les parties les plus intéressantes de la journée, quand j’écoute quelqu’un j’arrive à vivre au travers de ce qu’il dit”, indique-t-elle à BBC Afrique.

Eldaa Koama qui confie avoir fait onze ans de théâtre, a d’ailleurs été demi-finaliste lors d’un concours d’art oratoire en 2017 au Liban et finaliste l’année suivante.

Emmanuel Macron au sommet Afrique-France
Légende image, Emmanuel Macron au sommet Afrique-France

Coach et formatrice, Ragnimwendé Eldaa Koama est entrepreneure dans l’évènementiel et présidente de l’association Fenêtre d’Afrique qu’elle a fondée, et qui a pour objectif la promotion du patrimoine africain.

Elle est titulaire d’un master en management des systèmes informatiques et d’une licence en ingénierie des travaux informatiques.

Ragnimwendé Eldaa Koama répond à cinq questions de BBC Afrique

Comment en êtes-vous venu à participer à ce sommet Afrique France ?

Je suis une entrepreneure, citoyenne burkinabè qui a aussi un parcours en termes de débat oratoire depuis 2013.

Je m’intéresse aux questions sociales parce que je suis engagée dans des associations, je défends le fait que les jeunes doivent s’impliquer dans le développement local, le développement sera toujours endogène.

Donc toutes ces implications au niveau sociale et entrepreneuriale ont certainement donné assez de volume à mon profil pour être retenu parmi les jeunes qui devaient s’exprimer au sommet.

Eldaa
Ekdaa Koama

Votre intervention est devenue virale sur les réseaux sociaux, vous attendiez-vous à un tel retentissement ?

Pas vraiment, pas vraiment. Je suis une utilisatrice moyenne des réseaux sociaux dans le cadre de mon travail. Mais je me rends compte que le message a été entendu au-delà même des africains qui étaient d’abord ma première cible.

D’autres personnes m’ont accostée depuis Montpellier pour me dire ”je ne suis pas africain mais je me suis senti concerné par ce que vous avez dit”. Ça m’étonne mais je pense que tant que ça éveille les consciences et mène des personnes à se prendre elles mêmes en charge pour se développer je ne peux qu’être contente.

Vous avez été accueillie en héroïne à votre retour au Burkina Faso qu’avez-vous ressenti ?

Beaucoup d’humilité, beaucoup de gratitude parce je vois qu’il y a des personnes qui me portent dans leurs cœurs. Je l’ai vraiment senti juste comme une famille qui accueille un des leurs qui était parti en voyage.

Après ça reste juste un premier pas, un premier discours. Le reste c’est nous qui devons le faire par les actions. J’attends que la jeunesse africaine puisse commencer à poser des actions concrètes qui montrent qu’elle veut et peut se développer par elle-même. https://bbc.com/ws/av-embeds/cps/afrique/region-58886267/p09y9wzg/frLégende vidéo,

” Il aurait pu comme beaucoup, président ou pas président, jouir de la vie … “.

Que pensez-vous du changement de dynamique du sommet qui est passé d’une rencontre entre chefs d’État à une rencontre entre la jeunesse africaine, la société civile et le président français ?

On était à un débat non-équilibré en termes de pouvoir de décision. On reste toujours en face d’un président qui peut faire des choix et nous en face une société civile qui partage nos convictions.

C’est vrai que ça peut donner un aperçu de ce qui se passe réellement dans la vie du citoyen lambda parce que c’est comme cela qu’on s’est exprimé en disant quel que soit ce qui est décidé entre les chefs d’Etats, c’est nous qui le subissons au quotidien et donc on vous porte votre voix.

Après ce n’est pas ce qui va changer drastiquement les relations entre l’Afrique et la France, il faudra que nos chefs d’État puissent porter aussi cette envie d’indépendance réelle pour que les relations changent.

Quel bilan tirez-vous du sommet ?

Il y a eu beaucoup d’émotions autour, beaucoup de commentaires. Je ne repose pas mes attentes à cent pour cent sur le président français, non. Je m’attends à ce que nous ici, particulièrement au Burkina, on puisse être plus concret sur le terrain, après si le président français décide de faire quelque chose de ses conclusions pas de soucis, mais on ne l’attendra pas pour nous réveiller et réaliser ce que l’on a décidé.

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