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Collectif juif décolonial

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« Nous combattons des animaux et nous agissons en conséquence. »
Yoav Galant, ministre de la Défense

« Toute la nation [palestinienne] est responsable. »
Isaac Herzog, président de l’État d’Israël

 Ces déclarations des plus hautes autorités politiques de l’État israélien concernant l’offensive militaire en cours à Gaza ne laissent planer aucun doute sur leurs intentions génocidaires.  

À l’heure où nous écrivons, 2808 Palestinien·nes ont été tué·es à Gaza, dont plus de 1000 enfants, par les bombardements massifs israéliens.
En l’espace d’une semaine, environ 6000 bombes y ont été lancées par l’armée israélienne, presque autant que par les États-Unis lors de l’année la plus meurtrière en Afghanistan. Le blocus total mis en place par l’armée israélienne autour de Gaza prive ses habitant·es d’eau, d’électricité et de nourriture, condamnant à mort des dizaines de milliers d’entre elleux. L’impossible évacuation ordonnée par les autorités israéliennes, l’intensification des bombardements et l’annonce d’une offensive terrestre imminente laissent présager un désastre humanitaire et un probable crime contre l’humanité. Cette violence punitive est annoncée, tolérée, permise et même soutenue par la communauté internationale.

Les bombardements israéliens visent délibérément à causer le plus de dommage possible, conformément à la doctrine militaire développée par l’ancien chef d’État-major Gadi Eizenkot, membre du cabinet d’urgence formé par Netanyahou pour diriger les opérations. Il n’y a aucune distinction entre le civil et le combattant armé. Il y a deux jours, sur la route Salah-Al Deen, l’armée israélienne a frappé un convoi de civils fuyant la ville de Gaza City, tuant au moins 70 personnes, principalement des femmes et des enfants. Qui plus est, les observateurs internationaux comme Amnesty et Human Rights Watch alertent sur l’utilisation de phosphore blanc, proscrit par le droit de la guerre, et certains cas sont déjà bien documentés. 

Le choc causé par les atrocités commises le week-end dernier par les combattants palestiniens a laissé la société israélienne dans un tel état de sidération que bien peu de voix s’élèvent pour dénoncer les crimes de guerre et la politique génocidaire de leur gouvernement. Ce dernier bénéficie d’un soutien important dans la société civile, y compris parmi les secteurs mobilisés contre lui sur la question de la réforme judiciaire. Les décennies de colonisation et d’occupation ont profondément ancré dans la conscience collective la déshumanisation des Palestinien·nes, légitimant le traitement inhumain et barbare qui leur est infligé.

De son côté, le gouvernement français, en défendant le « droit d’Israël à se défendre », a apporté son soutien à une offensive israélienne dont tout le monde savait déjà qu’elle viserait principalement les civils palestiniens. Franchissant un cran supplémentaire, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a ordonné l’interdiction systématique des manifestations de soutien au peuple palestinien et s’emploie à réprimer toute expression de solidarité. Verbalisations, interpellations, arrestations, procédures de dissolution, tous les moyens à disposition des appareils policier et judiciaire sont employés.

À Strasbourg, parmi les 13 manifestants arrêtés ce 13 octobre, figurent deux militant·es historiques du mouvement de solidarité, membres de l’Union juive française pour la paix (UJFP). Les journalistes sont aussi ciblés, à l’instar du journaliste Taha Bouhafs, arrêté avec sa carte de presse à la main alors qu’il couvrait le rassemblement. Ces arrestations sont politiques. La violation du droit élémentaire à manifester constitue un déni de démocratie qui s’inscrit dans le renforcement des tendances les plus autoritaires et illibérales de l’État sous la macronie. 

Afin de justifier sa politique répressive, le gouvernement français prend pour prétexte la nécessité de lutter contre l’antisémitisme. Sous ce prétexte fallacieux, qui se fonde sur la propagande israélienne amalgamant juif·ve et sioniste, antisionisme et antisémitisme, il crée les conditions du mal qu’il prétend combattre. Interdire l’expression légitime de la solidarité avec un peuple dont le nettoyage ethnique se déroule en direct sous nos yeux, tout en associant cette interdiction avec la lutte contre l’antisémitisme, ouvre la voie à tous les dérapages et à tous les amalgames.

Nous dénonçons avec la plus grande fermeté cette politique irresponsable qui, loin d’aller dans le sens d’un apaisement en France, s’attaque au droit démocratique de manifester en en faisant porter le chapeau aux juif·ves. Interdire que la colère et la solidarité s’expriment légalement et dans le cadre du mouvement de soutien à la lutte anticoloniale des Palestinien·nes, c’est prendre le risque qu’elles s’expriment avec d’autant plus de confusions et de débordements. Ce sont les crimes israéliens, et non pas leur dénonciation, qui alimentent l’antisémitisme. 

En tant que juif·ves, nous réaffirmons que la douleur ressentie actuellement par les juif·ves de France et les Israélien·nes suite aux massacres du Hamas ne saurait justifier un nettoyage ethnique à Gaza. Nous refusons qu’un génocide soit réalisé en notre nom.

Nous appelons toutes les organisations, associations et personnalités se réclamant de la lutte universelle pour la justice, la dignité et l’égalité à serrer les rangs. Face au pire qui se prépare en Palestine, face à l’autoritarisme et au racisme en France, notre responsabilité est immense.

Nous réclamons :  

– La libération des militant·es et manifestant·es arrêté·es
– Le droit de manifester en solidarité avec la lutte du peuple palestinien
– L’arrêt immédiat des bombardements israéliens et le retrait des forces armées israéliennes
– La levée du blocus et du siège de Gaza
– Des négociations en vue de la libération des otages et des prisonnier·es politiques
– Des sanctions internationales contre l’État israélien

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